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ne parle si bien dans une de ses lettres à Fontanus, let. xxix. liv. VII.

Vous rirez, lui dit-il, vous entrerez en colere, & puis vous recommencerez à rire, si vous lisez ce que vous ne pourrez croire sans l’avoir lû. On voit sur le grand chemin de Tibur, à un mille de la ville, un tombeau de Pallas avec cette inscription : Pour récompenser son attachement & sa fidélité envers ses patrons, le sénat lui a décerné les marques de distinction dont jouissent les préteurs, avec quinze millions de sesterces (environ quinze cens mille livres de notre monnoie) & il s’est contenté du seul honneur.

Je ne m’étonne pas ordinairement, continue Pline, de ces élévations où la fortune a souvent plus de part que le mérite. Je l’avoue pourtant, j’ai fait réflexion combien il y avoit de momeries & d’impertinences dans ces inscriptions, que l’on prostitue quelquefois à des infames & à des malheureux. Quel cas doit-on faire des choses qu’un misérable ose accepter, ose refuser, & même sur lesquelles il ose se proposer à la postérité pour un exemple de modération ? Mais pourquoi me fâcher ? il vaut bien mieux rire, afin que ceux que le caprice de la fortune éleve ainsi ne s’applaudissent pas d’être montés fort haut, lorsqu’elle n’a fait que les exposer à la risée publique. (Le chevalier de Jaucourt.)

TIBURON. Voyez Requin.

TIC, s. m. (Gram.) geste habituel & déplaisant : il se dit au simple & au figuré. Il a le tic de remuer toujours les piés. Il veut faire des vers, c’est sa maladie, son tic. Il n’y a peut-être personne qui, examiné de près, ne décelât quelque tic ridicule dans le corps ou dans l’esprit. Wasp a le tic de juger de tout sans avoir jamais rien appris.

Tic, (Maréchal.) maladie des chevaux ou mauvaise habitude qu’ils ont d’appuyer les dents contre la mangeoire ou la longe du licou, comme s’ils les vouloient mordre, ce qu’ils ne font jamais qu’ils ne rottent. Un cheval ticqueur ou qui ticque, ou sujet au tic, se remplit de vents, & devient sujet aux tranchées : le tic est fort incommode & se communique dans une écurie.

Il y a à cette incommodité plusieurs palliatifs qui ne durent que quelques jours, comme d’entourer le cou près de la tête d’une courroie de cuir un peu serrée, de garnir le bord de la mangeoire de lames de fer ou de cuivre, de frotter la mangeoire avec quelque herbe fort amere, ou avec de la fiente de vache ou de chien, ou avec de la peau de mouton ; mais le meilleur & le plus efficace est de donner l’avoine dans un havresac pendu à la tête du cheval, & de lui ôter sa mangeoire.

TICAL, s. m. (monnoie.) c’est une monnoie d’argent qui se fabrique & qui a cours dans le royaume de Siam : elle pese trois gros & vingt-trois grains.

TICAO, (Géog. mod.) île d’Asie, une des Philippines, habitée par des Indiens, qui sont la plûpart sauvages. Elle a huit lieues de tour, un bon port, de l’eau, du bois en abondance, & est à 4 lieues de Burias. (D. J.)

TICARIUS, (Géog. anc.) fleuve de l’île de Corse. Ptolomée, liv. III. ch. marque l’embouchure de ce fleuve sur la côte occidentale de l’île, entre Paucacivitas & Titanis-portus : le nom moderne est Grosso, selon Léander. (D. J.)

TICHASA, (Géog. anc.) ville de l’Afrique propre. Elle est marquée par Ptolomée, l. IV. c. iij. au nombre des villes qui sont entre les fleuves Bagradas & Triton, & au midi de Carthage. (D. J.)

TICINUM ou TICINUS, (Géog. anc.) ville d’Italie, chez les Insubres, sur le bord d’un fleuve de même nom. Pline, liv. III. chap. xvij. nous apprend qu’elle avoit été bâtie par les Gaulois. Dans la suite des tems elle devint un municipe, comme le prouve

Cluvier par une ancienne inscription où on lit ces mots : municipi patrono : elle fut célebre sous les empereurs ; le nom moderne est Pavie. Voyez ce mot qui est corrompu de Pabia ou Papia, nom que les auteurs du moyen âge lui donnent. (D. J.)

TICOU, (Géog. mod.) ville des Indes, dans l’île de Sumatra, sur la côte occidentale, vis-à-vis de Pulo-Menton. Elle dépend du royaume d’Achem, & son territoire abonde en poivre. (D. J.)

TIDOR, TIDORE, TYDOR, (Géog. mod.) en arabe Tubara, île de la mer des Indes, dans l’Archipel des Moluques, à l’orient de celle de Gibolo, au midi oriental de Ternate, & au nord de l’île Motir. Elle produit, comme l’île de Ternate, le clou de girofle & la noix muscade : son circuit est d’environ sept lieues. Il y a un volcan du côté du sud. Les Hollandois ont chassé les Portugais de cette île, & en sont depuis long-tems les maîtres au moyen des forts qu’ils y ont élevés, quoiqu’il y ait un roi qui fait sa résidence à Tidor, capitale de l’île, & qui est sur sa côte orientale. Long. suivant Harris, 116d. 46′. 15″. lat. 0. 36′. (D. J.)

TIEDE, adj. (Gram.) d’une chaleur médiocre. Ce terme est bien vague ; entre la glace & l’ébullition il y a un grand intervalle : où commence la tiedeur, où finit-elle, & où commence la chaleur ? Il semble qu’il n’y ait qu’un instrument gradué qui pût apporter quelque précision à l’acception de ce mot si essentiel à déterminer par le rapport qu’il a avec la santé, la maladie, & l’art qui s’occupe à la conservation de l’un & à la guérison de l’autre. On dit, faites infuser à tiede ; prenez de l’eau tiede ; faites tiedir ces substances avant que de les mêler ; donnez ce médicament tiede. Tiede & tiedeur se prennent aussi figurativement. Il est devenu bien tiede sur cette affaire ; je fuis les amis tiedes ; je méprise les amans tiedes ; cette eau commence à tiedir ; sa passion est bien tiede.

TIEL, TIELE, ou THIEL, (Géog. mod.) ville des Pays-bas, dans la province de Gueldre, & la principale du bas Bétuwe. Cette ville fut fondée dans le neuvieme siecle ; & dans le suivant, l’an 950, Otton le grand la donna à Baldric, évêque d’Utrecht. Dans le onzieme siecle Tiel, le Bétau, le Veleau, furent inféodés à Godefroy le Bossu, duc de Brabant. Par un traité de paix de l’an 1335, Tiel fut cédé à Renaud, comte de Gueldre. Enfin durant les guerres des Paysbas, cette ville, après divers évenemens, passa l’an 1588, au pouvoir des Etats-généraux, malgré tous les efforts du duc de Parme. Long. 22. 40. lat. 51. 5.

C’est à Tiel que naquit Bibauc, en latin Bibaucius (Guillaume), mort général des chartreux, l’an 1535, après avoir passé dans son pays pour un prodige d’éloquence & de savoir. Le lecteur pourra juger de son talent dans l’art de la parole, par l’échantillon d’un de ses sermons prêché le jour de la Magdelaine, & rapporté dans le second tome des mélanges d’histoire & de littérature.

Dans ce sermon Bibauc dit que, « Marthe étoit une très-bonne femme, rara avis in terris, fort attachée à son ménage, très-pieuse, & qui se plaisoit beaucoup à aller entendre le sermon & l’office divin ; mais que Magdelaine sa sœur étoit une coquette qui n’aimoit qu’à jouer, à courir, & à perdre le tems ; que cependant Marthe n’épargnoit rien pour l’attirer à Dieu ; que pour ne la pas effaroucher, faciebat bonam sociam, elle faisoit le bon compagnon avec elle, & entroit en apparence dans ses inclinations mondaines ; desorte que sachant combien elle aimoit le bon air & le beau langage, elle lui dit des merveilles de la personne & des sermons de Notre Seigneur, pour l’obliger finement à le venir écouter ; que Magdelaine poussée de curiosité y vint enfin ; mais qu’arrivant trop tard, comme les dames de qua-