Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 16.djvu/71

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Septime Sévere fit encore dans la suite des réparations considérables à ce beau monument de la piété des anciens ; mais le temple est toujours demeuré tel qu’il étoit au tems de Pline, avec la seule différence qu’il a été dépouillé de ses statues, & de cette grande quantité d’ornemens de bronze dont il étoit enrichi. On ne voit pas même où pouvoient être placées les caryatides dont Pline fait mention ; on a soupçonné qu’elles avoient occupé l’attique qui regne au-dessus des colonnes, dans l’intérieur de l’édifice. On ignore le tems auquel elles ont été supprimées, & on n’est pas plus instruit du motif de leur destruction. Il y a cependant apparence qu’on est venu à cette extrémité lorsque le temple a été converti en église, il a fallu en ôter les statues des divinités ; & les caryatides furent mises apparemment au rang des statues, par des gens qui ne savoient pas que les caryatides étoient un ordre d’architecture, & n’avoient aucun rapport avec le culte religieux.

Les plaques de bronze dorées qui couvroient toute la voute, furent enlevées par l’empereur Constance III. Le pape Urbain VIII. se servit des poutres du même métal pour faire le baldaquin de S. Pierre, & les grosses pieces d’artillerie qui sont au château Saint-Ange ; en un mot, toutes les choses précieuses dont ce temple étoit rempli ont été dissipées. Les statues des dieux, qui étoient dans les niches qu’on voit encore dans l’intérieur de temple, ont été ou pillées ou enfouies ; & il n’y a pas bien long-tems encore, qu’en creusant près de cet édifice, on trouva un lion de Basalte, qui est un beau marbre d’Egyte, & puis un autre, qui servirent à orner la fontaine de Sixte V. sans parler d’un grand vase de porphire, qu’on plaça près du portique. (D. J.)

Temple d’Eleusis, (Antiq. grecq.) un des plus célebres du monde, élevé en l’honneur de Ceres & de Proserpine. Hetinus le fit d’ordre dorique, & d’une si vaste étendue, qu’il étoit capable de contenir trente mille personnes ; car il s’en trouvoit du moins autant, & souvent plus, à la célébration des mysteres de ces deux déesses ; c’est un fait que certifient Hérodote, l. VIII. ch. lxv. & Strabon, l. IX. pag. 365. Vitruve observe que ce temple étoit d’abord sans colonnes au-dehors, pour laisser plus de place & de liberté aux cérémonies religieuses qui se pratiquoient dans les sacrifices éléusiniens ; mais Philon dans la suite y ajouta un portique magnifique. (D. J.)

Temple d’Éphèse, (Antiq. grecq.) Voyez Éphèse, temple d’.

Le premier temple d’Ephèse, qui fut brûlé par Erostrate, passoit pour une des sept merveilles du monde : on avoit employé 220 ans à l’élever. Les richesses de ce temple devoient être immenses, puisque tant de rois avoient contribué à l’embellir, & qu’il n’y avoit rien de plus fameux en Asie que cet édifice.

Le second temple d’Ephèse fut construit par Cheiromocrate, le même qui bâtit la ville d’Alexandrie, & qui du mont Athos vouloit faire une statue d’Alexandre. Ce dernier temple, que Strabon avoit vû, n’étoit ni moins beau, ni moins riche, ni moins orné que le premier. Xénophon parle d’une statue d’or massif qui y étoit. Strabon assure aussi que les Ephésiens, par reconnoissance, y avoient placé une statue d’or en l’honneur d’Artémidore. Le concours de monde qui se rendoit à Ephese pour voir ce temple, étoit infini. Ce que raconte saint Paul, Act. 19. de la sédition tramée par les orfévres d’Ephèse, qui gagnoient leur vie à faire de petites statues d’argent de Diane, est bien propre à nous prouver la célébrité du culte de cette déesse.

Vitruve observe que le temple dont nous parlons étoit d’ordre ionique & diptérique, c’est à-dire qu’il regnoit tout-à-l’entour deux rangs de colonnes, en

forme d’un double portique ; il avoit 71 toises de longueur, sur plus de 36 de largeur, & l’on y comptoit 127 colonnes de 60 piés de haut.

Ce temple étoit un asyle des plus célebres, qui s’étendoit à 125 piés aux environs. Mithridate l’avoit borné à l’espace d’un trait de fleche. Marc Antoine doubla cette étendue ; mais Tibere pour éviter les abus qui se commettoient à l’occasion de ces sortes de droits, abolit cet asyle : aujourd’hui on ne trouve plus, d’un si superbe édifice, que quelques ruines, dont on peut voir la relation dans le voyage de Spon. (D. J.)

Temples d’Esculape, (Antiq greq. & rom.) ce dieu de la santé fut premierement honoré à Epidaure, ville d’Esclavonie, où il avoit un temple magnifique & une statue d’or & d’ivoire d’une grandeur extraordinaire, sculptée par Trasimede de l’île de Paros. Le dieu étoit représenté assis sur un trone, tenant d’une main un bâton, & s’appuyant de l’autre sur la tête d’un dragon, avec un chien à ses piés. Pausanias dit que ce chien étoit mis aux piés d’Esculape, parce qu’un chien l’avoit gardé lorsqu’il fut exposé ; on pourroit aussi penser, dit M. le Clerc, que ce chien étoit l’emblème de l’attachement, du zèle, & des autres qualités nécessaires à un médecin dans sa profession.

Les Romains éleverent un temple à Esculape dans l’île du Tibre. L’occasion en fut extraordinaire au récit d’Aurélius Victor.

Rome & le territoire qui l’environnoit, étoient ravagés par la peste. Dans cette désolation, on envoya dix ambassadeurs à Epidaure avec Q. Ogulnius à leur tête, pour inviter Esculape à venir au secours des Romains. Les ambassadeurs étant arrivés à Epidaure, comme ils s’occupoient à admirer la statue extraordinaire d’Esculape, un grand serpent sortit de dessous son autel, & traversant le temple, il alla dans le vaisseau des Romains, & entra dans la chambre d’Ogulnius. Les ambassadeurs comblés de joie à ce présage, mirent à la voile, & arriverent heureusement à Antium, où les tempêtes qui s’éleverent alors, les retinrent pendant quelques jours. Le serpent prit ce tems pour sortir du vaisseau ; & il alla se cacher dans un temple situé dans le voisinage, qui étoit dédié à Esculape. Le calme étant revenu sur la mer, le serpent rentra dans le vaisseau, & s’avança sur le rivage où on lui bâtit un temple, & la peste cessa.

Pline dit qu’on bâtit un temple d’Esculape en cet endroit par une espece de mépris pour l’art qu’il avoit inventé, comme si les Romains avoient envoyé à Epidaure une ambassade solemnelle, à dessein d’injurier le dieu dont ils avoient alors besoin.

Plutarque a rendu une meilleure raison au jugement de M. le Clerc, du choix qu’on faisoit de certains lieux, pour y bâtir les temples d’Esculape. Il a pensé que celui des Romains, & presque tous ceux de la Grece, avoient été situés sur des lieux hauts & découverts, afin que les malades qui s’y rendoient, eussent l’avantage d’être en bon air.

Il n’y a pas de doute que ce ne fût à l’imitation des Grecs, que les Romains placerent le temple d’Esculape hors de Rome ; & l’on pourroit apporter une excellente raison de la préférence que les Grecs donnerent à cette situation : ils avoient éloigné le temple d’Esculape des villes, de peur que la corruption occasionnée par la foule des malades qui s’adressoient aux prêtres de ce dieu pour être guéris, ne passât dans les lieux qu’ils habitoient, si les temples en avoient été voisins, ou qu’ils n’eussent respiré un air empesté par la même cause, s’ils avoient été élevés dans les villes. (D. J.)

Temple de la Félicité, (Antiq. rom.) templum Felicitatis. Les Romains dresserent un temple & un autel à cette déesse, & firent faire sa statue par Ar-