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Quand il y a un plus grand nombre de concessionnaires, on est obligé d’en mettre plusieurs dans les mêmes bassinets, & c’est alors que les grosses jauges alterent beaucoup les petites : à ceux qui auront quatre lignes, six lignes, neuf lignes, douze lignes, on leur distribuera la quantité d’eau qui leur est dûe, par le moyen de la quille Voyez l’article Jauge.

S’il s’agit de distribuer l’eau dans un jardin, en la supposant amenée dans le reservoir au haut du parc d’où il la faut conduire dans les différentes parties d’un jardin, on doit d’abord examiner, 1o la quantité d’eau que l’on a, 2o la situation du lieu, 3o le nombre de fontaines que l’on se propose d’exécuter.

La jauge fait connoître la quantité d’eau qui se rend dans le reservoir, par exemple, d’un pouce allant jour & nuit, donnant en vingt-quatre heures 70 muids, & par heure près de 3 muids : l’expérience ayant fait connoître que l’eau courante d’un pouce de diametre, donnoit treize pintes & demie par minute, pourvû qu’elle soit entretenue une ligne au-dessus de l’orifice de la jauge.

La seconde chose à examiner, est la situation du lieu. Quoiqu’en des jardins on en distingue de trois especes différentes, les jardins de niveau, ceux en pente douce, & les jardins en terrasses ; cependant par rapport aux fontaines, il n’en faut compter que deux, ceux en pente douce ou en terrasses étant les mêmes.

Dans un jardin de niveau, on ne peut pas faire joüer avec 70 muids d’eau par jour quantité de bassins, parce qu’il les faut tous tirer du même reservoir, ce qui le mettroit bientôt à sec. Retranchez-vous donc à fournir un bassin ou deux ; proportionnez-y la dépense des deux jets, que je suppose de six lignes d’ajutage chacun, venant d’un reservoir de 60 piés de haut. Pour me servir du calcul fait dans la premiere formule (au mot Dépense), ces deux jets dépenseront chacun par heure muids, & 660 en vingt-quatre heures, ce qui fait pour les deux 1320 muids d’eau par jour. Cela fait voir l’impossibilité de faire deux jets, puisqu’un seul pendant trois heures dépenseroit 82 muids & demi, & vuideroit le reservoir, à moins qu’il ne fût très-grand : il faut donc une juste proportion entre la dépense du jet & le contenu du reservoir.

Si dans ce jardin de niveau vous aviez des sources plus abondantes, comme de huit à dix pouces, tombant continuellement dans le reservoir, vous pourriez alors projetter de faire plusieurs bassins, & de tirer du reservoir deux conduites dont le diametre fût proportionné à la sortie des ajutages.

Ayant dix pouces, vous aurez par jour 720 muids, ce qui peut fournir deux jets de six lignes d’ajutage, qui, suivant le calcul ci-dessus, venant d’un reservoir de 60 piés de haut, dépenseroient 330 muids chacun en douze heures de tems, ce qui fera 660 muids pour les deux, en les arrêtant la nuit, & il y aura 60 muids d’eau de reste : l’on pourroit même ne faire qu’un jet en face du bâtiment, lequel ayant huit lignes de sortie, dépenseroit en un jour 1176 muids ; mais en l’arrêtant la nuit, & le laissant aller douze heures de jour, il ne dépenseroit que 588 muids, & il resteroit encore 132 muids dans le reservoir.

C’est ainsi que quand on sait calculer & regler son eau, on peut faire joüer un jet toute la journée. L’habile fontainier se peut encore ménager des pentes que la nature lui refuse, en baissant le terrein de quelques pouces d’un bassin à un autre, ce qui est suffisant pour donner de l’eau à gueule-bée à une orangerie ou à un potager.

On a moins d’embarras à distribuer l’eau dans les jardins en terrasses : en supposant toûjours un reser-

voir de 60 piés de haut, dont la source d’un pouce

fournira 70 muids d’eau par jour, on n’aura sur la premiere terrasse qu’un seul jet à tirer d’un reservoir, & ce jet fournira le deuxieme, le deuxieme le troisieme, & le troisieme le quatrieme ; ainsi le même jet de six lignes d’ajutage, en joüant trois heures par jour, dépensera 82 muids & demi, & consommera toute l’eau du reservoir, s’il n’a pas une grande capacité.

Si vous avez des cascades & des buffets à fournir, la distribution devient plus difficile : ces pieces vont ordinairement de la décharge des bassins supérieurs, & ne se tirent point du principal reservoir. Si ces décharges ne sont pas suffisantes, on prend de l’eau dans quelqu’autre bassin ; de maniere qu’une nappe, pour être bien nourrie, doit avoir deux pouces d’eau par chaque pié courant, & quand la premiere nappe est fournie, elle peut en faire aller vingt de suite. S’il y a des boüillons & des chandeliers qui accompagnent les cascades, pourvu qu’on fournisse les deux premiers de chaque côté par des conduites particulieres d’un pouce & demi chacune, le premier de chaque côté fournira le troisieme, le second le quatrieme, & ainsi des autres. Il n’est pas nécessaire dans les cascades, de s’assujettir à la proportion des conduites par rapport à la sortie des ajutages, on ne cherche qu’à leur donner de la grosseur. (K)

Distribution, (Jardinage.) la distribution d’un jardin est la même chose que sa disposition ; l’une & l’autre doivent suivre la situation du terrein ; tout dépend de profiter des avantages du lieu & de corriger avec art les défauts qui s’y rencontrent. Les jardins les plus beaux sont les plus variés, ainsi chaque distribution demande un génie nouveau ; cette distribution doit être bien raisonnée, elle tire sa beauté de l’accord & de la proportion de toutes les parties entr’elles. Quand on n’a à disposer qu’un potager, qu’un fruitier, le génie trouve peu à s’exercer ; il n’en est pas de même quand il s’agit d’inventer & de disposer un jardin de plaisance ou de propreté.

Comme il y a trois sortes de jardins, ceux de niveau parfait en pente douce & en terrasses, c’est suivant les différentes situations qu’on doit en distribuer les parties : en effet ce qui conviendroit à un jardin de niveau parfait, réussiroit mal dans un qui seroit dressé sur la pente naturelle, ou coupé de plusieurs terrasses.

Nous avons quatre maximes fondamentales pour disposer un beau jardin : l’art doit céder à la nature, c’est la premiere maxime ; la seconde est de ne pas trop offusquer un jardin ; la troisieme, de ne le point trop découvrir ; enfin la quatrieme est de faire paroître un jardin plus grand qu’il ne l’est effectivement.

Observez sur-tout de ne point mettre vuide contre vuide, c’est-à-dire un boulingrin contre un bassin, ni tous les bosquets ensemble, ce qui seroit plein contre plein ; opposez adroitement le plein au vuide, & le plat au relief.

Comme cette matiere passeroit les bornes prescrites aux lexicographes, on renvoye le lecteur au livre de la théorie & pratique du jardinage où elle est traitée amplement, & soutenue d’exemples & de très-belles planches qui ne laissent rien à desirer. (K)

Distribution, (Imprimerie.) ce mot, dans la pratique de l’Imprimerie, s’entend d’une quantité de pages ou de formes destinées, après avoir passé sous la presse, à être remises dans les casses lettre à lettre, & dans leur cassetin, pour reproduire de nouvelles pages & de nouvelles formes.

Distribution, se dit en Peinture, des objets & des lumieres distribués dans un tableau. Il faut re-