Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 4.djvu/236

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quatre, & on aura six fils pour chaque toron ; ou pour faire une corde de vingt-quatre fils à six torons, il faudra diviser vingt-quatre par six, & on aura quatre fils par toron. Mais on ne pourroit pas faire une corde de vingt-quatre fils à cinq torons, parce qu’on ne peut pas diviser exactement vingt-quatre par cinq ; ainsi il faudroit mettre vingt-cinq fils, & on auroit cinq fils par toron.

On met autant de manivelles au quarré & au chantier, qu’on a de torons, & on vire sur ces torons comme sur les trois dont nous avons parlé dans les articles précédens ; on les raccourcit d’une même quantité, on les réunit de même du côté du quarré à une seule manivelle : pour les commettre on se sert d’un toupin qui a autant de rainures qu’il y a de torons. Enfin en commettant les torons on les raccourcit autant que quand il n’y en a que trois ; ainsi il y a peu de différence entre la façon de fabriquer les aussieres à quatre, cinq ou six torons, & celles à trois.

De la meche. Quand on examine attentivement une aussiere à trois torons, on voit que les torons se sont un peu comprimés aux endroits où ils s’appuient l’un sur l’autre, & qu’il ne reste presque point de vuide dans l’axe de la corde. Si on examine de même une aussiere à quatre torons, on remarque qu’ils se sont moins comprimés, & qu’il reste un vuide dans l’axe de la corde. A l’égard des cordes à six torons, leurs torons sont encore moins comprimés, & le vuide qui reste dans la corde est très-grand.

Pour rendre sensible la raison de cette différence, considérons la coupe de trois torons placés parallelement l’un à côté de l’autre, comme dans la Pl. IV. fig. 1. C’est dans ce cas où il paroît qu’il doit moins rester de vuide entr’eux, parce que quand les torons sont gros, la difficulté qu’il y aura à les plier, augmentera le vuide, & d’autant plus que les révolutions des hélices seront plus approchantes de la perpendiculaire à l’axe de la corde. Nous ferons remarquer en passant, que cette raison devroit faire qu’il y auroit moins de vuide dans les aussieres à quatre & à six torons, que dans celles à trois, puisque les révolutions d’un toron dans celles à trois torons, sont bien plus fréquentes que dans celles à quatre, & dans celles à quatre que dans celles à six, néanmoins il reste plus de vuide dans les aussieres à quatre torons que dans celles à trois, & dans celles à six que dans celles à quatre, & cela pour les raisons suivantes.

Nous considérons l’aire de la coupe de trois torons posés parallelement comme les trois cercles, fig. 1. ABC, qui se touchent par leur circonférence. On appercevra que les cercles qu’on suppose élastiques, s’applattiront aux attouchemens, pour peu qu’ils soient pressés l’un contre l’autre, & que les torons rempliront aisément le vuide qui est entr’eux ; car ce vuide étant égal au triangle GHI, moins les trois secteurs ghi, qui valent ensemble un demi-cercle, ne sera que la vingt-huitieme partie de l’aire d’un des torons ; ainsi chaque toron n’a à prêter, pour remplir le vuide, que d’une quantité égale à la quatre-vingt-quatrieme partie de son aire ; encore cette quatre-vingt-quatrieme partie est-elle partagée en deux, puisque la compression s’exerce sur deux portions différentes de chaque toron. Or les torons peuvent bien se comprimer de cette petite quantité, d’autant qu’à mesure qu’ils se commettent, ils se détordent un peu, ce qui les amollit ; & les torons d’un cordage à trois torons faisant plus de révolutions dans des longueurs pareilles, que les torons des aussieres à quatre & à six torons, ils doivent se détordre & mollir davantage, à moins qu’en les commettant on ne fasse tourner les manivelles du

chantier beaucoup plus vite que quand on commet des aussieres à quatre, à cinq ou à six torons. Pour appercevoir à la simple inspection que la compression des torons d’une aussiere à trois torons est peu considérable, on peut jetter les yeux sur la figure 2. où l’on verra que les surfaces comprimées des torons font des angles de cent vingt degrés.

Il suit de ce que nous venons de dire, que pour connoître la quantité du vuide qui reste entre les torons de toutes sortes de cordages, il n’y a qu’à chercher le rapport d’une suite de polygones construits sur le diametre d’un des torons ; car le rapport des vuides sera celui de ces polygones, diminué successivement d’un demi-toron pour l’aussiere à trois torons, d’un toron pour l’aussiere à quatre, d’un toron & demi pour l’aussiere à cinq, & de deux torons pour l’aussiere à six torons, pourvû que les torons soient d’égale grosseur dans toutes les aussieres. Cela posé, examinons le vuide qui restera entre les torons d’une aussiere à quatre torons. Il est égal à un quarré L M N O, fig. 3. dont le côté est égal au diametre d’un toron, moins quatre secteurs lmno, égaux ensemble à un toron : or l’aire d’un quarré circonscrit à un toron étant à l’aire de la coupe de ce toron, à-peu-près comme 14 est à 11, l’aire de la coupe d’un toron sera au vuide compris entre les quatre torons, comme 14 moins 11 est à 11, ou comme 3 est à 11, c’est-à-dire que le vuide compris entre les quatre torons, ne sera que les trois onziemes de l’aire du toron. Il suffit donc, pour remplir le vuide, que chacun des quatre torons prête du quart de ces trois onziemes, ou de trois quarante-quatriemes, ou d’une quantité à-peu-près égale à la quinzieme partie de son aire. Il faudroit que les torons prissent à-peu-près la forme représentée par la fig. 4. & que les côtés applatis fissent des angles de quatre-vingt-dix degrés ; c’est trop : ainsi il restera un vuide dans l’axe de la corde, mais qui ne sera pas assez considérable pour qu’on soit dans la nécessité de le remplir par une meche. Si l’on examine de même la coupe d’une aussiere à six torons, fig. 5. on appercevra que le vuide qui restera entre les torons, sera beaucoup plus grand, puisqu’il égalera à peu de chose près l’aire de la coupe de deux torons, & que chacun des six torons sera obligé de prêter d’un tiers de son aire ; ainsi pour que les torons pussent remplir le vuide qu’ils laissent entr’eux, il faudroit qu’ils prissent à-peu-près la forme qui est représentée par la figure 6. & que les côtés applatis formassent des angles de 60 degrés.

On remarque sans doute que nous avons comparé des cordes de grosseur bien différente, puisque nous les avons supposé faites avec des torons de même grosseur, & que les unes sont formées de trois torons, les autres de quatre, les autres de six ; & on juge peut-être que nous aurions dû comparer des cordes de même grosseur, mais dont les torons seroient d’autant plus menus, que les cordes seroient composées d’un plus grand nombre de torons, pour dire, par exemple, que le vuide qui est dans une aussiere de quatre pouces de grosseur, est tel, si elle est formée de trois torons, tel, si elle est formée de quatre torons, & tel, si elle est formée de six torons ; mais ce problème est résolu par ce qui a précédé : car puisqu’il est établi que l’espace qui reste entre trois torons, est égal à la vingt-huitieme partie de l’aire d’un toron ; que celui qui reste entre quatre torons, est égal à trois onziemes de l’aire d’un des torons ; & que l’espace qui reste entre six torons, est égal à l’aire de la coupe de deux torons, on pourra, sachant la grosseur des torons, en conclure le vuide qui doit rester entr’eux pour des aussieres de toute grosseur, & composées de trois, quatre ou six torons. Néanmoins il faut convenir que