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Dans les autres provinces purement coûtumieres, le droit Romain n’a point force de loi ; on n’y a recours que comme à une raison écrite.

On tient aussi communément que les coûtumes sont de droit étroit, c’est-à-dire qu’elles ne reçoivent point d’extension d’un cas à un autre, quoique quelques auteurs se soient efforcés de soûtenir le contraire.

Lorsqu’il se trouve un cas non prévû par les coûtumes, la difficulté est de savoir à quelle loi on doit avoir recours ; si c’est au droit Romain, ou aux coûtumes voisines, ou à celle de Paris.

Quelques-uns veulent que l’on défere cet honneur à la coûtume de Paris, comme étant la principale coûtume du royaume ; mais quoique ce soit une des mieux rédigées, elle n’a pas non plus tout prévû, & elle n’a pas plus d’autorité que les autres hors de son territoire.

Il faut distinguer les matieres dont il peut être question : si ce sont des matieres inconnues dans les coûtumes, & qui ne soient prévûes que dans les lois Romaines, on doit y avoir recours comme à une raison écrite.

S’il s’agit d’une matiere de coûtumes, il faut suppléer de même ce qui manque dans l’une par la disposition d’une autre, soit la coûtume de Paris ou quelque autre plus voisine, en s’attachant principalement à celles qui ont le plus de rapport ensemble, & qui paroissent avoir le même esprit ; ou s’il ne s’en trouve point qui ait un rapport plus particulier qu’une autre, en ce cas il faut voir quel est l’esprit général du droit coûtumier sur la question qui se présente.

Les coûtumes sont en général réelles, c’est-à-dire que leurs dispositions ne s’étendent point hors de leur territoire ; ce qui est exactement vrai par rapport aux biens fonds qui y sont situés. A l’égard des personnes, les coûtumes n’ont aussi d’autorité que sur celles qui leur sont soûmises, mais elles ont leur effet sur ces personnes en quelque lieu qu’elles se transportent.

Lorsque plusieurs coûtumes paroissent être en concurrence, & qu’il s’agit de savoir laquelle on doit suivre, il faut distinguer si l’objet est réel ou personnel.

S’il s’agit de regler l’état de la personne, comme de savoir si un homme est légitime ou bâtard, noble ou roturier, majeur ou mineur, s’il est fils de famille ou joüissant de ses droits, & s’il peut s’obliger personnellement ; dans tous ces cas & autres semblables, où la personne est l’objet principal du statut, & les biens ne sont que l’objet subordonné, c’est la coûtume du domicile qu’il faut suivre.

Cette même coûtume regle aussi le sort des meubles, & de tous les droits mobiliers & immobiliers qui suivent la personne.

Pour ce qui est des immeubles réels, tels que les maisons, terres, prés, bois, &c. les dispositions que l’on en peut faire, soit par donations entre-vifs ou par testament ; comme aussi les partages, ventes, échanges, & autres aliénations ou hypotheques, se reglent par la coûtume du lieu de la situation de ces biens.

Les formalités extérieures des actes se reglent par la loi du lieu où ils sont passés.

Tels sont en substance les principes que l’on suit en cas de concurrence de plusieurs coûtumes, pour déterminer celle que l’on doit suivre ; mais comme ces questions s’élevent pour toutes sortes de statuts en général, soit lois, coûtumes, statuts proprement dits, ou usages, nous expliquerons ces principes plus au long au mot Statut.

Coutume annuelle, est une redevance en grain, vin, ou autres denrées, qui se paye annuellement au seigneur pour raison de quelque héritage

donné à cette condition, ou pour les denrées & marchandises vendues dans les foires & marchés. Voyez ci-après Coutume de blé, &c.

Bacquet, en son traité des droits de justice, chap. x. n°. 5. dit que par ce mot coûtume on ne doit pas entendre l’accoûtumance ou usage de lever tels droits, mais que ce mot est pris pour un tribut ou redevance qu’on a coûtume de lever en certain tems chaque année sur certaines denrées & marchandises qui se vendent & débitent aux foires & marchés.

Ce terme de coûtume pris dans ce sens, vient du droit Romain, où les tributs ordinaires étoient appellés coûtumes. La loi dit consuetudinem præstare, pour tributum præstare ; comme on voir en la loi 9. §. earum ff. de public.

Philippe I. s’exprime de même dans le privilége qu’il accorda à ceux de Chalo-Saint-Mas, ut in totâ terrâ regiâ nullam consuetudinem præstent ; ce qui s’entend des tributs ordinaires qui se levoient en ce tems-là, soit au profit du roi ou des seigneurs, ce que la coûtume d’Anjou appelle la grande & la petite coûtume. Voyez ci-après Grande & petite Coutume, Coutume du Pié rond.

Coutume de Bayonne, (Jurisp. Hist. & Fin.) est un droit local qui se perçoit dans le pays de labour, dans l’élection des Lannes & une partie du Bazadois. Les bourgeois de Bayonne en sont personnellement exempts, & toutes les marchandises qui leur appartiennent en conséquence des priviléges qu’ils se sont conservés par leur capitulation avec le roi Charles VII. Ce prince accorda la moitié de ce droit en propriété à la maison de Grammont, qui étoit alors très-puissante dans ce pays, en échange du château de Humblieres qui lui appartenoit dans la ville de Bordeaux. L’autre moitié de ce droit qui se perçoit au profit du roi, est comprise nommément dans le bail des fermes générales.

Coutumes de Bestiaux, voyez ci-après Coutumes de Blé, &c.

Coutumes de Blé, Vin, Volailles, Bestiaux, & autres denrées, sont des prestations de blé, vin & autres choses, qui se font au seigneur pour différentes causes.

Il y en a qui se payent par forme de péage, lorsque des marchandises passent sur un pont ou sous une porte.

D’autres se payent pour la vente qui se fait de ces marchandises, soit au marché ou en la seigneurie.

D’autres enfin se payent annuellement, pour raison de quelque héritage qui a été concédé à cette charge.

Il en est parlé dans plusieurs coûtumes, comme Tours, Anjou, Maine, Lodunois, Grand-Perche. Voyez ci-après Grande & petite Coutume.

Coutume bleue, est un surnom que les praticiens ont donné aux articles placités ou réglement de 1666 du parlement de Normandie. Ce réglement étant fait pour décider plusieurs cas qui n’étoient pas prévûs par la coûtume, on l’a regardé comme un supplément ou une seconde coûtume ; & comme l’imprimé ne formoit qu’un petit livret, que l’on vendoit broché & couvert d’un papier bleu, cela a donné occasion d’appeller ce réglement la coûtume bleue de Normandie.

Coutume de côté ou de simple côté, sont celles où pour succéder aux biens immeubles d’un défunt, il suffit d’être parent du côté d’où ils lui sont provenus ; si ce sont des biens paternels, il suffit d’être parent du côté paternel, & de même pour les biens maternels. On suit dans ces coûtumes la regle paterna paternis, materna maternis. Voyez ci-après Coutumes de côté & ligne.

Coutumes de côté & ligne, sont celles où