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chands, négocians, & manufacturiers ; ce qui a lieu quoique les faillis demeurent hors la ville de Lyon ; des choses servant au négoce, de quelque nature qu’elles soient ; & en cas de fraude elle peut seule procéder extraordinairement contre les faillis & leurs complices, mettre le scellé, faire inventaire & vente judiciaire des meubles & effets, même de leurs immeubles, par saisies, criées, vente & adjudication par decret, & distribution des deniers en provenans, sans qu’aucune des parties puisse se pourvoir ailleurs, sous prétexte de committimus, incompétence, ni autrement, à peine de trois mille livres d’amende, & de tous dépens, dommages & intérêts ; à la charge seulement que les criées seront certifiées par les officiers de la sénéchaussée.

La conservation connoît de toutes ces matieres souverainement & en dernier ressort, jusqu’à la somme de cinq cents livres ; & pour les sommes excédentes cinq cents livres, les sentences sont exécutées par provision.

Toutes les sentences de ce tribunal, soit provisionnelles ou définitives, sont exécutées dans toute l’étendue du royaume sans visa ni pareatis, comme si elles étoient scellées du grand sceau.

Il est défendu à la sénéchaussée & siége présidial de Lyon de prononcer par contrainte par corps & exécution provisionnelle de leurs ordonnances & jugemens, conformément aux rigueurs de la conservation, à peine de nullité, cassation, &c. la faculté de prononcer ainsi étant reservée à la conservation.

L’édit du mois d’Août 1714 a encore expliqué que les contraintes par corps émanées de la conservation s’exécutent par tout le royaume.

Ce tribunal est donc composé du prevôt des marchands & échevins, & de six autres juges bourgeois ou marchands, dont le premier est toûjours un avocat ancien échevin ; les second & troisieme sont les deux hommes du Roi. Les gens du Roi du bureau de la ville servent aussi à la conservation, & le secrétaire de la ville y exerce en cette qualité les droits & fonctions de greffier en chef ; il a sous lui un commis greffier. Il y a aussi pour le service de ce tribunal deux huissiers audienciers & jurés crieurs, & un juré trompette.

Les avocats ès cours de Lyon avoient été admis à plaider à la conservation dès 1689, par un arrêt du 23 Avril de ladite année ; ils avoient néanmoins négligé pendant un certain tems de fréquenter ce tribunal, d’où les procureurs se prétendoient en droit de les en exclure : mais par arrêt du 20 Août 1738, enregistré au siége le 24 Novembre suivant, les avocats ont été confirmés dans le droit de plaider à la conservation, comme ils font depuis cet arrêt.

Outre la jurisdiction principale de la conservation, il y a aussi dans l’enclave du même tribunal la jurisdiction du parquet, qui fait partie de la cour de la conservation. Par arrêt du conseil d’état du Roi & lettres patentes en forme d’édit enregistré au parlement, les charges d’avocat & de procureur général de la ville de Lyon ont été réunies à celle de procureur du Roi en la conservation, & c’est en cette derniere qualité que le procureur général de la ville juge gratuitement & en dernier ressort jusqu’à la somme de cent livres de principal. Ses sentences sont aussi exécutoires par corps. (A)

Conservation ou Bailliage du Chatelet de Paris, voyez au mot Chatelet, à la subdivision Bailliage ; & ci-devant au mot Conservateur, à la subdivision Conservateur des Priviléges royaux de l’Université. (A)

Conservation, (Pharmacie.) La conservation est une partie essentielle de la Pharmacie, qui consiste à préserver d’une altération nuisible à la perfec-

tion du médicament toutes les drogues, soit simples,

soit composées, que l’apothicaire est obligé de garder dans sa boutique, & qu’il lui seroit ou impossible ou peu commode de se procurer chaque jour.

L’humidité & la chaleur sont les deux grands instrumens de la corruption des substances médicales qui sont les sujets de la conservation pharmaceutique ; c’est donc à prévenir l’action destructive de ces deux agens, que doivent tendre tous les moyens qu’on y employe.

C’est à l’une ou à l’autre de ces causes que se rapportent principalement la plûpart des effets qu’on attribue vaguement au contact de l’air, ou à la communication avec l’air libre. Il est pourtant quelques-uns de ces effets qui ne pourroient pas y être rapportés avec assez d’exactitude : telle est la dissipation de certaines substances très-volatiles, qui quoiqu’elles soient à-peu-près proportionnelles au degré de chaleur du milieu dans lequel ces substances sont gardées, a pourtant lieu dans la température de ce milieu qu’on appelle froid. On ne prévient cette dissipation qu’en interrompant exactement toute communication entre ces substances & l’air.

C’est pour cela que la conservation des eaux aromatiques distillées, des eaux spiritueuses, des huiles essentielles, dépend moins de ce qu’on les tient dans un lieu frais, que de ce qu’on a soin de boucher exactement le vaisseau qui les contient. On conserve plus sûrement encore ces dernieres substances, on prévient ou on retarde leur épaississement en les conservant sous l’eau, lorsqu’elles sont spécifiquement plus pesantes que ce dernier liquide, ou sur l’eau dans des bouteilles renversées, lorsqu’elles sont plus legeres.

Il est une exception assez singuliere à la regle de boucher exactement les vaisseaux qui contiennent des substances volatiles aromatiques ; le degré de parfum qui fait la sensation agréable ne se trouve dans quelques-unes de ces substances, qu’après qu’elles ont perdu une partie de leur odeur. Le fait est sensible dans l’eau de fleurs d’oranges. Aussi les bons Apothicaires ne couvrent-ils que d’un papier la bouteille à l’eau de fleurs d’oranges qui sert actuellement au détail de la boutique.

On ne sait pas non plus assez distinctement quelle autre vue on pourroit avoir en supprimant toute communication entre l’air & certains sucs qu’on conserve sous l’huile, que l’exclusion même de cette communication. L’observation nous a appris qu’ils moisissoient à leur surface, & qu’ils se corrompoient facilement lorsqu’on ne prenoit pas la précaution de les couvrir d’un peu d’huile ; & cette observation suffit sans doute pour autoriser cette méthode.

Nous revenons aux deux principaux instrumens de la corruption des médicamens officinaux, & premierement à l’humidité ou à l’eau. Ce principe nuisible à leur conservation, doit être considéré ou dans les matieres mêmes, ou dans l’atmosphere.

On prévient l’effet de l’eau inhérente aux matieres mêmes, ou par la dessiccation (Voyez Dessiccation), ou par une espece d’assaisonnement qui occupe cette eau, qui la fixe, qui la rend inactive. C’est principalement le sucre ou le miel que l’on employe à cet assaisonnement, qui fournit les boutiques des syrops, des conserves, des électuaires, &c. Voyez Sirop, Conserve, Electuaire, &c. Aussi l’unique regle pour rendre ces préparations durables, consiste-t-elle à les priver de toute eau libre, ou à les réduire par la cuite en une consistance qui constitue leur état durable, & qui doit varier selon que ces préparations doivent être gardées plus ou moins long-tems, conservées dans un lieu conve-