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portant aux dieux les offrandes & les prieres des hommes, & annonçant aux hommes la volonté des dieux. Il n’en admettoit que de bons & de bien-faisans. Mais ses disciples, dans la suite, embarrassés de rendre raison de l’origine du mal, en adopterent d’autres, ennemis des hommes. Chambers. (G)

Cette nouvelle opinion n’étoit pas moins révoltante pour la raison, que la nécessité du mal dans l’ordre des choses. Car en supposant, comme on y étoit obligé, un être supérieur dont ces esprits étoient dépendans, comment cet être leur auroit-il laissé la liberté de nuire à des créatures qu’il destinoit au bonheur ? c’étoit un abysme pour l’intelligence humaine, & dans lequel la religion seule a pû porter le flambeau. Article de M. Marmontel.

Il n’y a rien de plus commun dans la théologie payenne, que ces bons & ces mauvais génies. Cette opinion superstitieuse passa chez les Israëlites par le commerce qu’ils eurent avec les Chaldéens ; mais par les démons ils n’entendoient point le diable ou un esprit malin. Ce mot n’a été employé dans ce dernier sens que par les évangélistes & par quelques Juifs modernes.

Un auteur anglois nommé Gale, s’est efforcé de prouver que l’origine & l’établissement des démons étoit une invention d’après l’idée du Messie. Les Phéniciens les appelloient baalim. Ils reconnoissoient un être suprème, qu’ils nommoient Baal & Moloch ; mais outre cela ils admettoient sous le nom de baalim quantité de divinités inférieures, dont il est si souvent fait mention dans l’ancien Testament. Le premier démon des Egyptiens fut Mercure ou Theut. L’auteur que nous venons de citer trouve beaucoup de ressemblance entre différentes fonctions attribuées aux démons, & celles du Messie. Chambers. (G)

Démon de Socrate, (Hist. anc. & hist. de la Philosophie.) Ce philosophe disoit avoir un génie familier, dont les avertissemens ne le portoient jamais à aucune entreprise, mais le détournoient seulement d’agir lorsqu’une action lui auroit été préjudiciable. Cicéron rapporte dans son livre de la divination, qu’après la défaite de l’armée athénienne, commandée par le préteur Lachez, Socrate fuyant avec ce général, & étant arrivé dans un lieu où aboutissoient plusieurs chemins différens, il ne voulut jamais suivre la même route que les autres, alléguant pour raison que son démon l’en détournoit. Socrate en effet se sauva, tandis que tous les autres furent tués ou pris par la cavalerie ennemie. Ce trait, & quelques autres semblables, persuaderent aux contemporains de Socrate, qu’il avoit effectivement un démon ou un génie familier. Les écrivains, tant anciens que modernes, ont beaucoup recherché ce que ce pouvoit être que ce démon, & plusieurs ont été jusqu’à mettre en question si c’étoit un bon ou mauvais ange. Les plus sensés se sont réduits à dire que ce n’étoit autre chose que la justesse & la force du jugement de Socrate, qui par les regles de la prudence & par le secours d’une longue expérience soûtenue de sérieuses réflexions, faisoit prévoir à ce philosophe quelle seroit l’issue des affaires sur lesquelles il étoit consulté, ou sur lesquelles il déliberoit pour lui-même. Le fait rapporté par Cicéron, & qui parut alors merveilleux, tient bien moins du prodige que du sens froid que Socrate conserva dans sa fuite ; la connoissance d’ailleurs qu’il avoit du pays put le déterminer à préférer ce chemin, qui le préserva des ennemis, à la cavalerie desquels il étoit peut-être impraticable. Mais on conjecture que Socrate ne fut peut-être pas fâché de persuader à ses concitoyens, que quelque divinité s’intéressoit à son sort, & par le commerce particulier qu’elle entretenoit avec lui, le tiroit du niveau des autres hommes. (G)

DÉMONA, VAL DE DÉMONE, (Géog. mod.)

vallée de la Sicile ; elle a quarante lieues de long, sur vingt-cinq de large. Messine en est la ville la plus importante.

Démona ou Demont, fort d’Italie, au marquisat de Saluces, dans le Piémont ; il est situé sur la Stur. Long. 25. 1. lat. 44. 18.

DÉMONIAQUE, s. m. (Théolog.) se dit d’une personne possédée d’un esprit ou démon. Voyez Possession.

Dans l’église romaine il y a des prieres & des formules particulieres pour exorciser les démoniaques. Voyez Exorcisme. (G)

Démoniaques, s. m. pl. (Hist. ecelés.) on a aussi donné ce nom à un parti d’Anabaptistes qui se sont distingués des autres en soûtenant que les démons seroient sauvés à la fin du monde. Voyez Anabaptistes.

DÉMONOGRAPHE, s. m. (Divinat.) écrivain qui traite des démons ou génies mal-faisans, de la magie ou sorcellerie, & des magiciens ou sorciers. Parmi les plus célebres démonographes on compte Agrippa, Flud, Bodin, Wyer, Delrio, & c. Ce mot est formé du grec Δαίμων, génie, & de γράφω, j’écris. (G)

DÉMONOMANIE, s. f. (Médecine.) c’est une espece de maladie spirituelle, qui est une variété de la mélancholie : le délire dont sont affectés les démoniaques, consiste à se croire possédés ou obsédés du démon ; d’autres s’imaginent avoir assisté & pouvoir assister aux assemblées chimériques des malins esprits, au sabbat ; d’autres se persuadent d’être ensorcelés : on peut joindre à tous ceux-là les fanatiques & les faux prophetes, qui croyent agir ou parler par l’inspiration d’un bon génie, être en relation immédiate avec Dieu, converser avec le S. Esprit, avoir le don des miracles, &c. Voyez Démon, Possedé, Sorcier, Magicien, Fanatique, Prophete, Miracle, Medecine magique. Voyez la recherche de la vérité de Malbranche ; les lettres de Bayle ; Delrio, disquisit. magic, &c.

On peut mettre au nombre des mélancholies démoniaques, celle de certaines folles dont parle Willis, & dont les exemples ne sont pas bien rares, qui ayant l’esprit frappé des vérités de la religion, & de la crainte de l’enfer, desesperent du salut éternel, & en conséquence se précipitent, se noyent. Voyez les observations de Schenkius, & la vie de Moliere.

L’illustre Baldus tomba dans une mélancholie fanatique, pour avoir été mordu par son chat, selon le rapport de M. de Sauvages, dans ses classes de maladies.

Le même auteur dit, d’après M. Antoine de Jussieu & Boerhaave, que le stramonium fructu oblongo spinoso flore violaceo, &c. fournit une huile, qui, appliquée aux tempes, cause les visions des sorciers ; la semence prise à demi-dragme rend fou.

Hurnius fait mention d’une démonomanie phrénétique. (d)

DÉMONSTRABLE, adj. (Métaph.) ce terme n’est pas fort en usage ; il signifie qui peut être démontré. Voyez Démonstration.

DÉMONSTRATEUR, s. m. (Médecine & Chirurgie.) On donne particulierement ce nom à celui qui donne des leçons d’Anatomie sur le cadavre, dans un amphitéatre public ou particulier.

DÉMONSTRATIF, en Grammaire, se dit des pronoms qui servent à indiquer, marquer, ou faire connoître une chose, comme ille, iste, hic, celui-ci, ce, cette, ce jeune homme, cette ville. Voyez Pronom. (G)

Démonstratif, adj. (Belles-Lettres.) nom que l’on donne à un des trois genres de la Rhétorique,