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tout depuis qu’a paru le célebre traité du cœur de M. Senac. Voyez Saignée.

On appelle aussi dérivation, le mouvement des humeurs qui se portent vers une partie relâchée par le bain, les fomentations, dans celles qui sont moins pressées que les voisines ; par l’effet des ventouses, par la suction, qui diminuent le poids de l’atmosphere, &c.

On employe encore ce terme de dérivation, pour désigner l’effet de certaines évacuations, comme celles qui se font par la voie des selles, des sueurs, des urines, qui, à proportion qu’elles sont plus augmentées, diminuent davantage toutes les autres, parce que la matiere de celles-ci se porte vers les couloirs de celles-là ; ainsi les purgatifs servent souvent à détourner l’humeur qui se porte trop abondamment vers les reins, comme dans l’inflammation de ce viscere, dans le diabetes. Les humeurs étant attirées vers les intestins, y sont dérivées des voies des urines, &c.

Les cauteres, les sétons, servent aussi à faciliter la dérivation des humeurs vers une partie moins essentielle, en les attirant par la résistance diminuée, & en détournant ainsi les fluxions de certaines parties qu’il est plus important de conserver saines. Voyez Cautere, Diabetes, Fluxion, &c. (d)

DÉRIVÉ, adj. Voyez Dérivation.

DERIVE, s. f. (Marine.) c’est la différence qu’il y a entre la route que fait le navire, & la direction de sa quille ; ou bien la différence qu’il y a entre le rumb de vent sur lequel on court, & celui sur lequel on veut courir, & vers lequel on dirige la proue de son vaisseau.

Lorsque le vent n’est pas absolument favorable, & que les voiles sont orientées obliquement, le navire est poussé de côté, & alors il s’en faut beaucoup qu’il ne suive dans son mouvement la direction de la quille : on nomme dérive cet écart, ou l’angle que fait la vraie route avec la ligne de la longueur du vaisseau. Quelquefois cet angle est de plus de vingt ou vingt-cinq degrés ; c’est-à-dire que le navire, au lieu de marcher sur le prolongement de sa quille, suit une direction différente de cette même quantité. Il est donc important pour la justesse de l’estime & la sûreté de la route, de connoître la quantité de la dérive, qui est différente dans différens cas, & l’on doit l’observer avec soin. Pour le faire, il faut remarquer que le vaisseau, en fendant la met avec force, laisse toûjours derriere lui une trace qui subsiste très-long tems. On peut prendre cette ligne pour la vraie route, & l’on observe son gissement avec la boussole, ou plûtôt le compas de variation ; comparant ensuite ce gissement avec celui de la quille, leur différence est la dérive. Pour une plus parfaite intelligence, voyez la Pl. XV. fig. 1. où AB représente un vaisseau dont A est la poupe, & B la proue. La voile ED, au lieu d’être située perpendiculairement à la quille, est orientée obliquement, afin de recevoir le vent qui vient de côté, & qui la frappe selon la direction VC ; le navire sera poussé par sa voile, non-seulement selon sa longueur, mais il le sera aussi de côté, & il suivra la route CP, qui peut faire un angle aigu avec la direction du vent. Comme il doit trouver beaucoup plus de difficulté à fendre l’eau par le flanc que par la proue, il est soûtenu par la résistance que fait le milieu, sur lequel son flanc se trouve comme appuyé ; il présente la proue au vent ; il gagne par sa marche contre le vent, ou, pour s’expliquer autrement, il remonte vers le lieu d’où vient le vent : il est pour ainsi dire dans le cas d’un bateau qui étant dans un large fleuve, iroit obliquement contre son cours. On sent très-bien qu’on ne peut empêcher qu’il n’y ait de la dérive : il faut donc en observer la quantité exacte,

ou la grandeur de l’angle BCF ; ce qui se peut faire, puisque la trace CG que forme l’eau agitée par le mouvement du navire, est en ligne droite avec la ligne CF, comme on l’a dit ci-dessus.

Un quart de dérive. On dit avoir un quart de dérive, pour marquer que le vaisseau perd un quart de rumb de vent sur la route qu’on veut faire. On veut faire, par exemple, le nord-ouest ; il y a un quart de dérive vers l’ouest ; la route ne vaut que le nord-ouest ouest, & ainsi des autres rumbs. (Z)

Dérive, (Mar.) c’est un assemblage de planches que les navigateurs du Nord mettent au côté de leurs petits bâtimens, afin d’empêcher qu’ils ne dérivent. Voyez Semelle.

Dérive, (à la) Marine ; c’est quelque chose qui flote sur l’eau au gré du vent & du courant. (Z)

DÉRIVER, v. n. (Marine.) c’est ne pas suivre exactement sa route, soit par la violence des vents, des courans, ou des marées. On dit qu’un vaisseau se laisse dériver, pour dire qu’il s’abandonne au gré des vents & des vagues.

DÉRIVOTE, s. f. terme de Riviere ; perche servant à éloigner un train de la rive.

DÉRIVOIR, s. m. (Horlogerie.) outil d’horlogerie ; espece de poinçon fort semblable au pousse-pointe : il a un trou comme lui ; mais le bord du trou au lieu d’être un peu large est au contraire fort étroit, afin qu’il ne déborde pas les rivures des assiettes ou des pignons. Il sert à dériver une roue, c’est-à-dire à la chasser de dessus son assiette ou de dessus son pignon ; le trou doit être fort long, afin que les tiges puissent s’y loger sans qu’en haussant les roues on puisse les endommager. (T)

DERNIER, s. m. terme de jeu de Paume, c’est la partie de la galerie qui comprend la premiere ouverture à compter depuis le bout du tripot jusqu’au second. Quand on pelotte à la paume, les balles qui entrent dans le dernier sont perdues pour le joüeur qui garde ce côté ; mais quand on joüe partie, elles font une chasse qu’on appelle au dernier à remettre.

Dernier ressort, (Jurispr.) Voyez Justice, Jurisdiction & Ressort. (A)

DERNIS, (Géog. mod.) ville de la Dalmatie.

DÉROBÉ, (Maréchal.) pié dérobé. Voyez Pié.

DÉROBEMENT, s. m. (coupe des Pierres.) c’est la maniere de tailler une pierre sans le secours des panneaux par le moyen des hauteurs & profondeurs qui déterminent ce qu’il en faut ôter, comme si on dépouilloit la figure de son enveloppe, ainsi que font les Sculpteurs. (D)

DÉROBER UNE MARCHE, (Art. milit.) se dit dans l’art militaire lorsque le général d’une armée a fait une marche par une espece de surprise sur son ennemi, c’est-à-dire sans que le général ennemi en ait été informé. Cette faute de se laisser ainsi dérober ou souffler une marche, a souvent de si grandes, suites, que rien n’est plus humiliant ni plus chagrinant pour celui qui s’y laisse surprendre. M. de Folard prétend qu’un général en est plus mortifié que de la perte d’une bataille, parce que rien ne prête plus à la glose des malins & des railleurs.

On dérobe une marche à l’ennemi de deux manieres : la premiere en décampant sans qu’il en soit informé ; & la seconde en faisant une marche forcée, c’est-à-dire en faisant en un jour le chemin que dans l’usage ordinaire on feroit en deux. On ne doit jamais forcer les marches sans une grande nécessité, parce qu’elles minent les hommes & les chevaux. (Q)

Dérober le vent, (Marine.) se dit lorsqu’un vaisseau étant au vent d’un autre l’empêche de recevoir le vent dans ses voiles ; c’est lui dérober le vent.