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ancien de tous ces doyens est celui que l’on appelle le doyen des enquêtes : on entend par-là le plus ancien de tous les conseillers, soit laïcs ou clercs, excepté au parlement de Paris, où les conseillers-clercs forment un ordre à part pour monter à la grand’chambre, au moyen de quoi il y a deux doyens des enquêtes ; savoir, le doyen des conseillers-laïcs, & le doyen des conseillers-clercs ; l’un & l’autre est le premier montant à la grand’chambre lorsqu’il y vaque une place de son ordre. Le doyen des enquêtes a ordinairement une pension du roi, qu’il perd en montant à la grand’chambre ; il est néanmoins obligé d’y monter à son rang. (A)

Doyen d’une Faculté, est celui qui est à la tête de cette compagnie, soit par ancienneté ou par charge. Les doyens des facultés de Théologie, de Droit, & de Medecine, sont conseillers-nés du recteur de l’université, avec les quatre procureurs des quatre nations qui composent la faculté des Arts. Dans la faculté de Théologie de Paris, c’est le plus ancien des docteurs séculiers résidens à Paris, qui est le doyen de la faculté : il préside aux assemblées de la compagnie, recueille les suffrages, prononce les conclusions, & a séance au tribunal du recteur de l’université au nom de la faculté, laquelle s’élit outre cela tous les deux ans un syndic.

Dans la faculté de droit, le doyen ou ancien des six professeurs s’appelle primicerius. Ils élisent tous les ans entr’eux à tour de rolle, le jour de S. Matthias, un doyen en charge, qui assiste au tribunal du recteur & a voix conclusive dans les assemblées de la faculté. Ils élisent aussi tous les deux ans, le même jour, un doyen d’honneur, qui est une personne constituée en dignité, & choisie parmi les douze docteurs honoraires ou aggrégés d’honneur.

La faculté de Medecine, outre son doyen d’ancienneté, a un doyen en charge, dont l’élection se fait tous les ans le premier samedi d’après la Toussaint ; il est ordinairement continué pendant deux années : c’est lui qui a place au tribunal du recteur. Ce doyen en charge, avec six autres docteurs, donnent gratis tous les samedis leurs consultations aux pauvres dans l’école supérieure de medecine. Il est aussi d’usage que ce doyen & douze docteurs s’y rendent tous les premiers samedis de chaque mois, pour conférer ensemble des maladies courantes, & sur-tout de celles où il y a de la malignité. (A)

Doyen de la Grand’Chambre, est le plus ancien de tous les conseillers laïcs ou clercs de la grand’chambre du parlement. (A)

Doyen d’honneur, honoris decanus, est une personne constituée en dignité, choisie parmi les douze aggrégés d’honneur. Voyez ce qui en est dit ci-devant à l’article Doyen d’une Faculté. (A)

Doyen juge : il y avoit chez les Romains des juges qui étoient ainsi appellés, & à l’imitation des Romains, on en avoit établi de même en France du tems de la premiere race sous les ducs & les comtes. Voyez les lettres historiques sur le parlement, partie I. pag. 125. & ce qui a été dit ci-devant au commencement de ce mot Doyen. (A)

Doyen ou Maire ; dans les Vosges de Lorraine c’est le titre que l’on donne au chef d’un certain district ou mairie du domaine du prince, qu’on appelle doyenné, ensorte que doyen veut dire autant que maire. Voyez les mémoires sur la Lorraine & le Barrois, pag. 142. (A)

Doyen des Maistres des Requêtes, ce titre se donne au plus ancien de chaque quartier : voyez ce qui a été dit ci-devant au titre Doyen des doyens. Le réglement du conseil du 3 Juin 1628, donne au doyen de chaque quartier séance aux conseils de direction & des parties, dans les trois mois qui suivent le quartier, pendant lequel ils sont de

service au conseil. Voyez Guillard, hist. du conseil, p. 123. (A)

Doyen d’un Monastere, étoit un religieux établi sous l’abbé pour le soulager & avoir inspection sur dix moines. Il y avoit un doyen pour chaque dixaine. Dans quelques monasteres ces doyens étoient bénis par l’évêque ou par l’abbé, ce qui leur donnoit lieu de s’égaler à l’abbé : ils étoient électifs & pouvoient être déposés après trois avertissemens. Comme les monasteres sont présentement moins nombreux, l’abbé ou le prieur n’ont plus tant besoin d’aides ; c’est pourquoi il n’y a plus de doyens dans les monasteres. Voyez la regle de S. Benoît, traduite par M. de Rancé, tom. II. ch. xxj. & ci-devant à l’article Doyen d’un chapitre. (A)

Doyen du Parlement, est le plus ancien en réception de tous les conseillers laïcs du parlement, tant de la grand’chambre que des enquêtes. Il arriva avant la révocation de l’édit de Nantes, que M. Madeleine, ci-devant doyen de la seconde des enquêtes, étant de la R. P. R. & ne pouvant par cette raison monter à la grand’chambre, le décanat fut déféré à celui qui le suivoit, & M. Madeleine fut obligé de descendre d’un degré. Guillard, histoire du conseil, pag. 180.

Les conseillers clercs ont quelquefois prétendu avoir le droit de décaniser à leur tour, lorsqu’ils se trouvoient plus anciens que les conseillers laïcs : pour soûtenir leur prétention, ils alléguoient l’usage observé au conseil, dans plusieurs cours supérieures, & autres tribunaux : ils citoient aussi, pour le parlement de Paris, qu’en 1284 Michel Mauconduit conseiller clerc étoit doyen : mais il paroît constant que depuis il n’y a aucun exemple qu’un conseiller clerc ait décanisé en la grand’chambre, & les conseillers laïcs ont toûjours été maintenus dans le droit de décaniser seuls à l’exclusion des conseillers clercs ; la question fut ainsi décidée par un arrêté du parlement en 1737, après la mort de M. Morel doyen du parlement, en faveur de M. de Canaye contre M. l’abbé Pucelle conseiller clerc, quoique celui-ci fût plus ancien que M. de Canaye. Le Roi accorda néanmoins une pension à M. l’abbé Pucelle en considération de son mérite personnel & de ses longs services.

Au parlement de Besançon l’usage est le même que dans celui de Paris : il y a même un réglement du parlement de Besançon, du 20 Juillet 1697, qui porte qu’un conseiller clerc n’y pourra jamais présider, parce que ce rang ne peut être occupé que par un laïc, le corps étant de cette qualité, comme l’observe de Ferriere en son traité des droits honorifiques, chapitre v. n. 11. & que l’on est informé que tel est l’usage des autres parlemens. Ce sont les termes du réglement de 1697, qui est exactement observé.

Il en est aussi de même aux parlemens de Toulouse, de Bourdeaux, & de Dijon ; le fait est ainsi attesté dans les mémoires qui furent faits au conseil, pour M. de la Reynie contre M. l’archevêque de Reims au sujet du décanat.

Il faut néanmoins observer, pour le parlement de Dijon, qu’il est d’usage dans ce parlement que l’abbé de Cîteaux précede le doyen, & qu’en l’absence de l’abbé de Cîteaux un autre conseiller clerc a cette préséance ; mais cela n’ôte pas au doyen cette qualité.

La place de doyen de ce parlement est d’autant plus avantageuse, que M. de Pouffier mort doyen, en 1736, a laissé à ses successeurs doyens sa maison, ses meubles, & 40000 liv. de contrats, le tout de valeur de 6000 liv. de revenu, à la charge de présider à une société de savans, & de distribuer par an trois prix de 300 livres chacun. Voyez ce qui est dit de cette fondation dans le mercure de France du mois de Mai 1736, p. 1021.