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est reçu à se purger par serment, auquel on ajoûte souvent celui de six ou douze hommes qui répondent tous de son intégrité. Ceux qui sont coupables de trahison, de meurtre, de double adultere, les incendiaires, & autres chargés de crimes odieux, sont punis de mort ; les hommes sont pendus, les femmes ont la tête tranchée ; quelquefois on les brûle vifs ou on les écartelle, ou on les pend enchaînés selon la nature des crimes. Les gentils-hommes qui ont commis de grands crimes ont la tête cassée à coups de fusil. Le larcin étoit autrefois puni de mort, mais depuis quelque tems le coupable est condamné à une espece d’esclavage perpétuel : on le fait travailler, pour le roi, aux fortifications ou autres ouvrages serviles ; & de peur qu’il ne s’échappe, il a un collier de fer auquel tient une clochette qui sonne à mesure qu’il marche. Le duel entre gentils-hommes est puni de mort en la personne de celui qui survit ; si personne n’est tué, les combattans sont condamnés à deux ans de prison au pain & à l’eau, & en outre en mille écus d’amende, ou un an de prison & deux mille écus d’amende. La justice est administrée en premiere instance par des jurés, & en dernier ressort par quatre parlemens ou cours nationales. (A)

DROIT ou DROITS, (Jurisprud.) signifie aussi fort souvent la faculté qui appartient à quelqu’un de faire quelque chose, ou de joüir de quelque chose de réel ou d’incorporel : tels sont par exemple les droits d’aînesse, d’amortissement, d’échange, de lods & vente, & autres semblables, que l’on expliquera chacun sous le terme qui leur est propre, comme Aînesse, Amortissement, Echange, Lods & ventes, &c.. Nous ne parlerons ici que de ceux qui ont une épithète ou surnom, que l’on ne peut séparer du mot droit sans détruire l’idée que ces deux mots présentent conjointement : comme par exemple :

Droits abusifs, sont ceux qui ont quelque chose de contraire à la raison, à l’équité, & à la bienséance ; tels, par exemple, que certains droits que quelques seigneurs s’étaient attribués sur leurs hommes, vassaux, & sujets : comme le droit que prétendait l’évêque d’Amiens, d’obliger les nouveaux mariés de lui donner une somme d’argent, pour avoir la permission de coucher ensemble la première nuit de leurs noces, dont il fut débouté par arrêt du parlement, du 19 Mai 1409 ; tels étaient encore les droits de cullage ou luilliage, & de cuisage, en vertu desquels certains seigneurs prétendaient avoir la premiere nuit des nouvelles mariées ; ce qui est depuis long-tems aboli. Il y a aussi des droits abusifs qui, sans être injustes ni contraires à l’honnêteté, sont ridicules ; comme l’hommage de la Tire-vesse dont il est parlé dans les plaidoyers célebres de Bordeaux, dédiés à M. de Nesmond, pag. 167. On convertit ordinairement ces droits en quelque devoir plus sensé et plus utile, ainsi que cela fut fait dans le cas dont on vient de parler. (A)

Droit acquis, jus quæsitum, c’est-à-dire celui qui est déjà acquis à quelqu’un avant le fait ou acte qu’on lui oppose, pour l’empêcher de joüir de ce droit. C’est un principe certain que le droit une fois acquis à quelqu’un, ne peut lui être enlevé sans son fait, & que le fait d’un tiers n’y sauroit nuire : ce qui est fondé sur la loi stipulatio, au digeste de jure dotium. Ce principe est aussi établi par Arnoldus Reyger, in thesauro juris, verbo jus quæsitum ; Gregorius Tolos. in sintagm. juris univ. lib. XLI. p. 508. Rebuff. gloss. 16. reg. cancell. de non tollendo jus quæsitum. (A)

Droit colonaire, jus colonarium, c’est le nom que la novelle 7 donne à une espece de bail à cens, qui étoit usité chez les Romains entre particuliers. Loiseau en son traité du déguerpiss, liv. I,

chap. jv. n. 30, prétend que ce contrat revenoit à peu-près à celui qu’on appelloit contrat libellaire ou datio ad libellam, qui étoit un bail perpétuel de l’héritage. (A)

Droit curial, signifie quelquefois ce qui fait partie des fonctions du curé ; quelquefois on entend par-là ce qui lui est dû pour son honoraire dans certaines fonctions. Voyez Curial. (A)

Droits ecclésiastiques, signifient tout ce qui appartient aux ecclésiastiques, comme leurs fonctions, les honneurs, préséances, priviléges, exemptions, & droits utiles qui peuvent y être attachés.

Droits épiscopaux, sont ceux qui appartiennent à l’évêque en cette qualité, comme de donner le sacrement de confirmation & celui de l’ordre, de benir les saintes huiles, de consacrer un autre évêque, de faire porter devant soi la croix levée en signe de jurisdiction dans son territoire. Voyez Episcopal, Evêché, & Evêque. (A)

Droit exorbitant, est celui qui est contraire au droit commun. (A)

Droits honorifiques, en général signifient tous les honneurs, prééminences, & prérogatives qui sont attachés à quelque qualité, office, commission, ou place ; comme le titre de prince, de duc & pair, le droit de séance au parlement, le titre de président ou de conseiller du roi, le droit de porter la robe rouge, de prendre le titre de chevalier ou d’écuyer, de précéder toutes les personnes d’un ordre inférieur dans les assemblées & cérémonies publiques, & plusieurs autres droits semblables, qu’il seroit trop long de détailler ; ils sont opposés aux droits utiles, qui n’ont pour objet que les profits & émolumens attachés à quelque place. (A)

Droits honorifiques dans les églises, sont des distinctions & honneurs qui appartiennent à certaines personnes dans les églises auxquelles leur droit est attaché.

On distingue deux sortes de droits honorifiques ; savoir les grands droits honorifiques, & les moindres honneurs.

Les grands droits honorifiques, appellés par les auteurs honores majores, & qui sont les seuls droits honorifiques proprement dits, sont le droit de litre ou ceinture funebre, les prieres nominales, le banc dans le chœur, l’encens, & la sépulture au chœur.

Ces sortes de droits n’appartiennent régulierement qu’à deux sortes de personnes, savoir le patron & le seigneur haut-justicier : ce dernier a droit de litre tant en-dedans qu’au-dehors de l’église ; le patron n’en peut avoir qu’au-dedans. Observez encore que le haut-justicier ne peut prétendre les droits honorifiques que dans les églises paroissiales, bâties dans sa haute-justice ; au lieu que le patron joüit de ces mêmes droits dans toutes les églises & chapelles dont il est patron ou fondateur.

Le patron joüit de ces droits, en considération de ce qu’il a doté ou bâti l’église, ou donné le fonds pour la bâtir ; le seigneur haut-justicier en joüit, en considération de ce qu’il a permis de bâtir l’église paroissiale dans son territoire, & comme ayant la puissance publique en vertu de laquelle il tient l’église sous sa protection.

En Bretagne & en Normandie, le patron a seul les droits honorifiques, à l’exclusion du haut-justicier ; mais ailleurs le haut-justicier y participe aussi.

En concurrence du patron & du seigneur haut-justicier, le patron est préféré dans l’église paroissiale au haut-justicier ; ainsi la litre du patron y est placée au-dessus de celle du haut-justicier : il est nommé le premier aux prieres ; il doit avoir la place la plus honorable pour son banc & pour sa sépulture, & reçoit l’encens le premier à l’offrande ou à la procession qui se fait dans l’église ; il passe devant le