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leurs longueurs sont égales. De telles cordes doivent donc être étendues également par des forces que l’on supposera en raison des quarrés de leurs diametres. Le même rapport doit aussi se trouver entre les forces qu’il faut pour courber des cordes, de façon que les fleches de la courbure soient égales dans des fibres données.

5°. Le mouvement d’une fibre tendue suit les mêmes lois que celui d’un corps qui fait ses oscillations dans une cycloïde ; & quelqu’inégales que soient les vibrations, elles se font toûjours dans un même tems. Voyez Cycloïde & Corde.

6°. Deux cordes étant supposées égales, mais inégalement tendues, il faut des forces égales pour les fléchir également : on peut comparer leurs mouvemens à ceux de deux pendules, auxquels deux forces différentes feroient décrire des arcs semblables de cycloïde, & par conséquent les quarrés des tems des vibrations des fibres sont les uns aux autres en raison inverse des forces qui les fléchissent également, c’est-à-dire des poids qui tendent les cordes. Voyez Pendule.

7°. On peut encore comparer d’une autre maniere les mouvemens des cordes semblables également tendues, avec ceux des pendules ; car comme on fait attention aux tems des vibrations, il faut aussi faire attention aux vîtesses avec lesquelles les cordes se meuvent : or ces vîtesses sont entr’elles en raison composée de la directe des poids qui fléchissent les cordes, & de l’inverse des quantités de matieres contenues dans les cordes, c’est-à-dire de la longueur de ces cordes. Les vîtesses sont donc en raison inverse des quarrés des longueurs, & des quarrés des tems des vibrations

Les lames ou plaques élastiques peuvent être considérées comme un amas ou faisceau de cordes élastiques paralleles. Lorsque la plaque se fléchit, quelques-unes des fibres s’allongent, & les différens points d’une même plaque sont différemment allongés.

On explique l’élasticité d’un fluide, en supposant à toutes ses parties une force centrifuge ; & M. Newton (Princ. math. prop. xxiij. liv. II.) prouve, d’après cette supposition, que les particules qui se repoussent ou se fuient mutuellement les unes les autres par des forces réciproquement proportionnelles aux distances de leur centre, doivent composer un fluide élastique dont la densité soit proportionnelle à sa compression ; & réciproquement, que si un fluide est composé de parties qui se fuient & s’évitent mutuellement les unes les autres, & que sa densité soit proportionnelle à la compression, la force centrifuge de ces particules sera en raison inverse de leurs distances. Voyez Fluide.

Au reste il faut regarder cette démonstration comme purement mathématique, & non comme déduite de la véritable cause physique de l’élasticité des fluides. Quelle que soit la cause de cette élasticité, il est constant qu’elle tend à rapprocher les parties desunies ou éloignées, & que par conséquent on peut la réduire, quant aux effets, à l’action d’une force centrifuge par laquelle les particules du fluide se repoussent mutuellement, sans qu’il soit nécessaire de supposer l’existence réelle d’une pareille force centrifuge. La démonstration subsiste donc, quelle que soit la cause physique de l’élasticité des fluides.

M. Daniel Bernoulli a donné dans son Hydrodynamique, les lois de la compression & du mouvement des fluides élastiques. Il en tire la théorie de la compression de l’air, & de son mouvement en passant par différens canaux ; de la force de la poudre pour mouvoir les boulets de canon, &c. Dans mon traité de l’équilibre & du mouvement des fluides, imprimé à Paris en 1744, j’ai aussi donné les lois de

l’équilibre & du mouvement des fluides élastiques. J’y remarque que le mouvement d’un fluide élastique differe principalement de celui d’un fluide ordinaire, par les lois des vîtesses de ses différentes couches. Ainsi quand un fluide non-élastique se meut dans un vase cylindrique, toutes les couches de ce fluide se meuvent avec une égale vîtesse ; mais il n’en est pas de même quand le fluide est élastique ; car si ce fluide se meut dans un cylindre dont un des bouts soit fermé, la vîtesse de ses tranches est d’autant plus grande, qu’elles sont plus éloignées de ce fond, à-peu-près comme il arrive à un ressort fixé par une de ses extrémités, & dont les parties parcourent en se débandant d’autant plus d’espace, qu’elles sont plus éloignées du point fixe. Du reste la méthode pour déterminer les lois du mouvement des fluides élastiques, est la même que pour déterminer celles des autres fluides. M. Bernoulli, dans ses recherches sur le mouvement des fluides élastiques, avoit supposé la chaleur du fluide constante, & l’élasticité proportionnelle à la densité. Pour moi j’ai supposé que l’élasticité agît suivant telle loi qu’on voudra.

M. Jacques Bernoulli, dans les mém. acad. 1703, où il donne la théorie de la tension des fibres élastiques de différentes longueurs, ou de leur compression par différens poids, remarque avec raison que la compression des fibres élastiques n’est pas exactement proportionnelle au poids comprimant ; & la preuve démonstrative qu’il en apporte, c’est qu’une fibre élastique ne peut pas être comprimée à l’infini ; que dans son dernier état de compression elle a encore quelqu’étendue ; & que quelque poids qu’on ajoûtât alors au poids comprimant, la compression ne pourroit pas être plus grande : d’où il s’ensuit évidemment que la compression n’augmente pas généralement en raison du poids.

Or ce que nous venons de remarquer d’après M. Jacques Bernoulli, sur la regle des pressions proportionnelles aux poids, a lieu dans les fluides élastiques ; par conséquent la regle qui fait les compressions proportionnelles aux poids dans les fluides élastiques (voyez Air & Atmosphere), ne sauroit être qu’une regle approchée. J’aimerois mieux dire, & ce seroit peut-être parler plus exactement, que la différence des compressions de l’air est proportionnelle aux poids comprimans ; mais que comme la compression de l’air est fort petite lorsque le poids comprimant = 0, c’est-à-dire comme l’air dans son état naturel est extrèmement dilaté, les expériences ont fait croire que les compressions de l’air étoient comme les poids, quoique cette proportion n’ait pas lieu rigoureusement : car soit P la compression de l’air dans son état naturel, & P + A, & P + B les compressions de ce même air par les deux poids a, b ; comme on suppose A & B fort grandes par rapport à P, il est évident qu’au lieu de la proportion a.b ∷ A.B, on peut prendre la proportion approchée a.b ∷ P + A : P + B. Voyez mes recherches sur la cause des vents, art. 81.

Sur les phénomenes de l’élasticité de l’air, voyez les mots Air & Atmosphere. C’est l’élasticité de l’air, & non son poids, qui est la cause immédiate de la suspension du mercure dans le barometre ; car l’air d’une chambre soûtient le mercure en vertu de son ressort : ainsi plus le ressort ou l’élasticité de l’air augmentent, plus le mercure doit monter, & au contraire. Les variations du barometre sont donc l’effet du changement de l’élasticité dans l’air, autant que du changement qui arrive dans son poids ; & comme, outre le poids de l’air, il y a une infinité de causes qui peuvent faire changer l’élasticité de l’air, comme la chaleur, l’humidité, le froid, la sécheresse, il s’ensuit que toutes ces causes concourent à la suspension plus ou moins grande du mercure.