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de l’humérus, rotations très-lentes. Ajoûtez à cela que ces combattans font toûjours partir le corps le premier ; habitude la plus repréhensible de toutes celles que l’on peut contracter dans les armes : car dans ce cas on est un tems infini à porter son coup, & souvent on ne dégage pas. Quand le bras est un peu fléchi, le poignet a la facilité d’agir, ses mouvemens sont plus rapides ; vous avez déjà engagé le fer de votre adversaire du côté où il présente des jours, qu’il ne s’en est point apperçu : le bras en s’allongeant alors, seconde les mouvemens du poignet ; & le reste de la machine développant rapidement ses ressorts, se porte en-avant, & donne une forte impulsion au poignet dans la direction qu’il s’est choisie : il faut donc que les articulations de ce bras soient libres, sans qu’il soit trop raccourci.

Le fer doit être dirigé à la hauteur du tronc de l’adversaire, la pointe au corps.

Le bras gauche doit être un peu élevé, libre dans ses articles, & placé en forme d’arc sur la même ligne que le pié droit.

La seconde attitude est celle qu’on affecte dans l’extension, c’est-à-dire lorsque l’on se porte sur son ennemi.

A-t-on choisi un moment favorable pour s’élancer sur son adversaire ? le fer est-il engagé ? la tête de l’os du bras droit doit s’affermir dans sa cavité, & se porter vers le creux de l’aisselle ; on appelle cela dégagement des épaules ; cependant cet os du bras se dirige vers le corps de l’ennemi, & s’étend sur l’avant-bras qui s’affermit dans l’articulation du poignet ; celui-ci est ou en supination ou en pronation suivant les coups portés, afin de former opposition.

Pendant que tous ces mouvemens s’operent dans le bras, les muscles des autres parties obéissant également à la volonté, agissent & portent le corps en-avant ; mais ce mouvement d’extension semble principalement être opéré par les muscles extenseurs des cuisses, qui dans leurs contractions écartent ces deux extrémités l’une de l’autre. Le bassin & le tronc se trouvent emportés en-avant par ce mouvement d’extension des extrémités, le pié droit s’éleve, parcourt en rasant la terre l’espace qui est entre lui & le pié de l’ennemi, & va tomber en droite ligne : il ne doit pas trop s’élever de terre.

Dans l’extension le corps doit avoir les attitudes suivantes.

Premierement les os du côté gauche doivent être affermis dans leurs articles, le pié du même côté ne doit point quitter la terre, toute la plante doit porter à plomb sur le sol.

Toute l’extrémité inférieure gauche doit donc être étendue, la droite au contraire fléchie dans toutes les articulations ; le bassin doit porter également sur ces deux extrémités, le tronc doit tomber à plomb sur le bassin. Ce précepte contrarie celui de quelques maîtres, qui après avoir fait poster dans la premiere attitude qu’on nomme garde, le tronc sur la partie gauche, veulent que dans l’attitude de l’extension le tronc se porte sur la partie droite ; il en résulte plusieurs inconvéniens, le tronc est dans une suspension gênante ; en outre il pese sur la partie qui doit se relever pour se porter en-arriere, & la fixe pour ainsi dire en-avant par sa gravité.

La tête doit rester droite sur le tronc & libre dans ses mouvemens ; pour la garantir il faut dégager les épaules, élever un peu le poignet, afin que tout le bras décrive un arc de cercle imperceptible : joignez à ceci une bonne opposition, & la tête sera éloignée & garantie des coups.

Quand on a porté son coup il faut se remettre en garde.

Après ces attitudes & ces mouvemens d’exten-

sion, viennent les mouvemens particuliers du poignet, comme dégagemens, bottes, &c. qui supposent la connoissance des mesures, des tems, des oppositions, & des appels.

La connoissance des mesures & des tems est le fruit d’un long travail & une science nécessaire des armes ; il faut un an pour acquérir la legereté, la souplesse & la promptitude des mouvemens.

Il faut des années pour apprendre à se battre en mesure, & à profiter des tems. La mesure est une juste proportion de distance entre deux adversaires de laquelle ils peuvent se toucher. On serre la mesure en avançant la jambe droite & en approchant ensuite la gauche dans la même proportion, de sorte qu’on se trouve dans la même situation où l’on étoit auparavant : ce mouvement doit approcher de l’ennemi ; on rompt la mesure quand on recule la jambe gauche de la droite, & que dans le second tems on approche la droite de la gauche ; ce mouvement doit éloigner de l’ennemi, on rompt toutes mesures en sautant en-arriere.

On désigne par le mot de tems les momens favorables que l’on doit choisir pour fondre sur l’ennemi, ils varient à l’infini, & il est impossible de rien dire de particulier là-dessus ; on manque les tems quand on part ou trop tôt ou trop tard ; on part trop tôt lorsque l’ennemi ne répondant point encore à de feints mouvemens qu’on a faits pour l’ébranler, on s’élance comme s’il y avoit répondu ; on part trop tard, lorsque voulant surprendre un ennemi dans ses propres mouvemens, on attend qu’il les ait exécutés & on ne part qu’en même tems que lui.

Quand on est en mesure on engage le fer, c’est-à-dire, que l’on croise son fer d’un ou d’autre côté avec celui de l’ennemi que l’on tâche toûjours de s’asservir en opposant le fort au foible. Voyez au mot Epée ce que c’est que le fort & le foible.

Le dégagement est un mouvement prompt & leger, par lequel sans déranger la pointe de son fer de la ligne du corps, on la passe par-dessus, ce qu’on appelle couper sur la pointe, ou par-dessous le fer de son ennemi, en observant comme nous venons de le dire, de s’en rendre maître autant que l’on peut par le moyen du fort au foible.

L’appel est un bruit que l’on fait sur la terre avec le pié qui doit partir, dans l’intention de déterminer son ennemi à faire quelque faux mouvement.

L’opposition a lieu dans les bottes & dans les parades, on oppose quand on courbe son poignet de façon que la convexité regarde le fer ennemi ; par ce moyen on éloigne l’épée de l’adversaire de la ligne de son corps, sans écarter la pointe de la sienne du corps de l’ennemi.

Quand on sait dégager & opposer, on s’exerce à tirer des bottes, c’est-à-dire à porter à l’ennemi des coups avec certaines positions du poignet qui caractérisent les bottes. Ces positions du poignet sont la supination, la pronation, & la position moyenne entre la supination & la pronation. Le poignet est en supination quand la paume de la main regarde le ciel. Il est en pronation quand la paume regarde la terre ; dans l’état moyen la paume de la main ne regarde ni la terre ni le ciel, mais elle est latéralement placée de façon que le pouce est en-haut : ces positions ne peuvent point se suppléer les unes aux autres, & on est obligé de les employer suivant les cas.

Les bottes sont la quarte simple, la quarte basse qui se tirent au-dedans de l’épée adverse, le poignet étant en supination.

La tierce, la seconde, ou tierce basse, qui se tirent au-dehors de l’épée.

La prime qui se tire au-dedans de l’épée, le poignet étant en pronation.