Page:Diderot - Le Neveu de Rameau.djvu/100

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à son ami ; qui s’empare du bien de ses associés ; qui n’a ni foi, ni loi, ni sentiment ; qui court à la fortune per fas et nefas, qui compte ses jours par ses scélératesses, et qui s’est traduit lui-même sur la scène comme un des plus dangereux coquins ; impudence dont je ne crois pas qu’il y eût dans le passé un premier exemple, ni qu’il y en ait un second dans l’avenir ? Non. Ce n’est donc pas Palissot, mais c’est Helvétius qui a tort. Si l’on mène un jeune provincial à la ménagerie de Versailles, et qu’il s’avise par sottise de passer la main à travers les barreaux de la loge du tigre ou de la panthère ; si le jeune homme laisse son bras dans la gueule de l’animal féroce, qui est-ce qui a tort ? Tout cela est écrit dans le pacte tacite ; tant pis pour celui qui l’ignore ou l’oublie. Combien je justifierais, par ce pacte universel et sacré, de gens qu’on accuse de méchanceté, tandis que c’est soi qu’on devrait accuser de sottise ! Oui, grosse comtesse, c’est vous qui avez tort, lorsque vous rassemblez autour de vous ce qu’on appelle parmi les gens de votre sorte des espèces, et que ces espèces vous font des vilenies, vous en font faire, et vous exposent au ressentiment des honnêtes gens. Les