Page:Dierx - Œuvres complètes, Lemerre, I.djvu/155

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Se voila d'un rideau jusqu'à nous inconnu ;
Sitôt que celui-là qui nous créa sans pactes,
Rompit les réservoirs des sombres cataractes,
Comprenant qu'il voulait noyer tout l'univers,
J'ai gravi devant l'eau la montagne sublime,
Et victime en extase, et jusqu'au bout pervers,
Je regardai rentrer les choses dans l'abîme.


V

Dans l'abîme à la fin, pêle-mêle et bien mort,
Gisait l'amas impur des races primitives.
Les torrents épuisés des vengeances hâtives
S'apaisaient, n'ayant plus de récif ni de bord.
Je ne voyais plus rien de mon observatoire,
Rien que la vaste mer et sa funèbre gloire,
Où les courts traits de feux aussitôt s'éteignaient.
Je n'apercevais plus ni murs, ni tours, ni dômes,
Ni temples de porphyre et de marbre, où régnaient
Les idoles, soutien des tragiques royaumes.
Sur les monts les géants qui s'appelaient entre eux,
Nulle part n'agitaient dehors leurs crins affreux ;
Aux lueurs de la foudre, effrayants, dans les nues
Ils ne souffletaient plus l'orage avec leurs bras ;
Aucun râle coupé sous leurs mamelles nues
Ne grondait. Ils flottaient insensibles, là-bas.