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LIVRE I.

les Athéniens sont les seuls Grecs qui jurent par Isis, et qui, par leurs opinions et leurs mœurs, ressemblent le plus aux Égyptiens. Ces derniers apportent encore beaucoup d’autres documents à l’appui de leur colonie, mais qui me paraissent plus ambitieux que vrais ; car la fondation d’une ville aussi célèbre qu’Athènes était pour eux un titre de gloire. Ils se vantent d’avoir dispersé leur race dans un grand nombre de contrées de la terre, ce qui attesterait la suprématie de leurs rois et une abondance de population. Comme cette opinion ne repose sur aucune preuve digne de foi, et qu’ils ne citent pas à cet égard d’autorité solide, nous n’avons plus rien qui mérite d’être rapporté. Nous terminons ainsi ce que nous avions à dire sur la théogonie des Égyptiens. Nous allons maintenant décrire en détail tout ce qui concerne le sol, le Nil, et d’autres choses remarquables.

XXX. L’Égypte s’étend principalement au midi, et semble, par la force de sa position et la beauté du sol, l’emporter sur tous les royaumes. Car, au couchant, elle a pour boulevard le désert de la Libye, peuplé de bêtes féroces, occupant une vaste surface qu’il serait non-seulement difficile mais fort dangereux de traverser, à cause du manque d’eau et de la rareté des vivres. Au midi, elle est défendue par les cataractes du Nil et par les montagnes qui les bornent. À partir du pays des Troglodytes et des frontières de l’Éthiopie, dans un espace de cinq mille cinq cents stades[1], le fleuve n’est guère navigable, et il est impossible de voyager à pied, à moins de mener à sa suite un train royal ou du moins beaucoup de provisions. Du côté du levant, l’Égypte est protégée en partie par le Nil, en partie par le désert et par des plaines marécageuses connues sous le nom de Barathres[2]. Il y a, entre la Cœlé-Syrie[3] et l’Égypte, un lac

  1. Cent myriamètres.
  2. Les Βάραθρα étaient situés entre Péluse et le mont Casius (Polybe, v. 80). C’étaient des marais inaccessibles et répandant des exhalaisons délétères (Strabon, XVI, p. 1076). L’auteur en parle encore plus bas, l. XX, chap. 74. Ces marais sont aujourd’hui en grande partie desséchés.
  3. Ἡ Κοίλη Συρία, la Syrie Creuse. C’était la vallée comprise entre le Liban et l’Anti-Liban.