Page:Diogène Laërce - Vies et doctrines des philosophes de l’Antiquité, trad. Zévort.djvu/332

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’à-propos dont nous avons parlé. Zénon de Citium dit dans les Chries qu’il se promenait gravement avec une peau de mouton cousue à son manteau. Il était fort laid, et quand il se livrait à ses exercices gymnastiques on se moquait de lui ; mais il avait coutume de dire alors en levant les mains : « Courage, Cratès, compte sur tes yeux et sur la force de ton corps ; un jour tu verras ceux qui maintenant rient de toi, accablés par la maladie, te déclarer heureux et maudire leur propre négligence. »

Il prétendait qu’il faut poursuivre l’étude de la philosophie jusqu’à ce qu’on regarde les généraux comme des conducteurs d’ânes. Il disait aussi que les gens entourés de flatteurs ne sont pas moins abandonnés que les veaux au milieu des loups, parce qu’au lieu de défenseurs les uns et les autres n’ont autour d’eux que des ennemis. Sentant sa fin approcher il chanta ces vers qu’il s’appliquait à lui-même :

Tu t’en vas, cher ami, tout courbé ; tu t’en vas au séjour de Pluton, voûté par la vieillesse[1].

En effet, il était courbé par les années. Alexandre lui ayant demandé s’il voulait qu’il rebâtît sa patrie, il répondit : « À quoi bon ? peut-être un autre Alexandre la détruirait de nouveau ;

Il faut avoir pour patrie l’obscurité et la pauvreté ; celle-là du moins est à l’abri des coups de la fortune. »

Il ajoutait : « Je suis citoyen de Diogène contre qui l’envie ne peut rien. »

Ménandre le cite en ces termes dans les Jumeaux :

  1. Homère, Odyss., II, 16.