Page:Diogène Laërce - Vies et doctrines des philosophes de l’Antiquité, trad. Zévort.djvu/494

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l’aise et exercer librement son intelligence. Suivant le même auteur, il dépensa tout son bien en voyages et revint dans un complet dénûment, si bien que son frère Damasus fut obligé de le nourrir ; mais une prédiction qu’il avait faite et que l’événement confirma lui valut auprès de la plupart de ses concitoyens la réputation d’un homme divin. Sachant, dit Antisthène, qu’une loi interdisait d’ensevelir dans sa patrie celui qui avait dépensé son patrimoine, et ne voulant pas donner prise aux envieux et aux calomniateurs, il lut à ses concitoyens son Mégas Diacosmos[1], le meilleur sans contredit de tous ses ouvrages ; l’enthousiasme fut tel que, non contents de lui accorder cinq cents talents, ils lui élevèrent des statues. À sa mort, il fut enseveli aux frais du public. Il avait vécu au delà de cent ans.

Démétrius prétend que ce furent ses parents qui lurent au public le Mégas Diacosmos, et que la récompense ne s’éleva qu’à cent talents. C’est ce que dit aussi Hippobotus. Aristoxène rapporte, dans les Commentaires historiques, que Platon avait eu l’intention de brûler tous les écrits de Démocrite qu’il avait pu rassembler, mais que les pythagoriciens Amyclas et Clinias l’en détournèrent en lui représentant qu’il n’y gagnerait rien, puisqu’ils étaient très-répandus. Ce qui confirme ce récit, c’est que Platon, qui a parlé de presque tous les anciens philosophes, ne cite pas une fois Démocrite, pas même lorsqu’il serait en droit de le combattre, sans doute parce qu’il savait bien à quel redoutable adversaire il aurait affaire. Timon fait de lui cet éloge :

Tel était le sage Démocrite, roi par l’éloquence,

  1. Grande organisation du monde.