Page:Diogène Laërce - Vies et doctrines des philosophes de l’Antiquité, trad. Zévort.djvu/500

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mesure de toutes choses, de l’être en tant qu’il est, du non-être en tant qu’il n’est pas. » Il enseignait aussi, au dire de Platon dans le Théétète, que l’âme n’est pas distincte des sens et que tout est vrai. Un autre de ses traités commence par ces mots : « Quant aux dieux, je ne puis dire s’ils existent ou non ; bien des raisons m’en empêchent, entre autres l’obscurité de la question et la brièveté de la vie humaine. » Cette proposition le fit expulser par les Athéniens ; ordre fut donné par un héraut à quiconque possédait ses ouvrages de les livrer, et on les brûla sur la place publique. Il est aussi le premier qui ait exigé pour ses leçons un salaire de cent mines. Le premier il a déterminé les parties du temps et expliqué l’importance de l’à-propos. Il institua les luttes oratoires et donna aux jouteurs l’arme du sophisme ; on lui doit aussi l’invention de ces futiles discussions, aujourd’hui en honneur, qui laissent les choses pour ne s’attacher qu’aux mots. C’est là ce qui a fait dire de lui par Timon :

L’insaisissable Protagoras, cet habile disputeur.

On lui doit également l’invention de l’argumentation appelée socratique. Platon dit dans l’Euthydème, qu’il s’est le premier servi des raisonnements par lesquels Antisthène cherchait à établir qu’on ne peut rien contredire. Il est le premier, au dire d’Artémidore le dialecticien dans le traité Contre Chrysippe, qui ait institué l’argumentation régulière sur un sujet donné. Aristote, dans le traité de l’Éducation, lui attribue l’invention des coussinets pour porter les fardeaux ; car il était portefaix, ainsi que l’atteste quelque part Épicure ; on dit même que c’est en le voyant lier un faix de bois que Démocrite conçut pour lui une haute estime. Il a le premier divisé le discours en quatre parties : la