Page:Discours sur les révolutions de la surface du globe, et sur les changemens qu'elles ont produits dans le règne animal.djvu/150

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à en juger par leurs déblais, ont dû être exploitées depuis plus de quarante mille ans ; mais un autre auteur, qui a aussi examiné ces déblais avec soin, réduit cet intervalle à un peu plus de cinq mille[1], et encore en supposant que les anciens n’exploitaient chaque année que le quart de ce que l’on exploite maintenant. Mais quel motif a-t-on de croire que les Romains, par exemple, tirassent si peu de parti de ces mines, eux qui consommaient tant de fer dans leurs armées ? de plus, si ces mines avaient été en exploitation il y a seulement quatre mille ans, comment le fer aurait-il été si peu connu dans la haute antiquité ?

Conclusion générale relative à l’époque de la dernière révolution.Je pense donc, avec MM. Deluc et Dolomieu, que, s’il y a quelque chose de constaté en géologie, c’est que la surface de notre globe a été victime d’une grande et subite révolution, dont la date ne peut remonter beaucoup au delà de cinq ou six mille ans ; que cette révolution a enfoncé et fait disparaître les pays qu’habitaient auparavant les hommes et les espèces des animaux aujourd’hui les plus connus ; qu’elle a, au contraire, mis à sec le fond de la dernière mer, et en a formé les pays aujourd’hui habités ; que c’est depuis cette révolution que le petit nombre des individus épargnés par elle se sont répandus et propagés sur les terrains nouvellement mis à sec, et par conséquent que c’est depuis cette époque seulement que nos sociétés ont repris une marche progressive, qu’elles ont formé des établissemens, élevé des monumens, recueilli des faits naturels, et combiné des systèmes scientifiques.

Mais ces pays aujourd’hui habités, et que la dernière révolution a mis à sec, avaient déjà été habités auparavant, sinon par des hommes, du moins par des animaux terrestres ; par conséquent une révolution précédente, au moins, les avait mis sous les eaux ; et, si l’on peut en juger par les différens ordres d’animaux dont on y trouve les dépouilles, ils avaient peut-être subi jusqu’à deux ou trois irruptions de la mer.

  1. Voyez M. de Fortia d'Urban, histoire de la Chine avant le déluge d'Ogygès, page 33.