Page:Dorgelès - Les Croix de bois.djvu/78

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de chocolat râpé dans ce fricot-là, ça ne ferait rien de sale…

Tous les dos se courbent ; ils étranglent de rire, ils étouffent, ils n’en peuvent plus. Mais cette fois, le cuistot résiste. Il hausse les épaules en relevant son pantalon à deux mains, d’un geste de dandy.

— Du chocolat dans d’la soupe, ça s’serait jamais vu. Tu m’prends pour un c…

— Dans d’la soupe qu’il dit, l’enfifré ! s’exclame Sulphart. Ce que c’est de la soupe, d’abord ? Et puis moi, hein, j’m’en colle. Mais si t’étais si marle que ça, c’était pas la peine de venir me chercher avec Broucke pour t’aider à faire la croûte. Une autre fois, tu ne m’auras plus…

Toute la bande approuve Sulphart, et Fouillard flétrit en trois mots crus la noire ingratitude de son successeur :

— Il t’donne un bon conseil et tu l’envoies ch… T’as tout d’la vache.

— Mais non, braille Vairon, il sait tout mieux que tout le monde…

Un des cuistots haussa les épaules :

— Ils sont tous les mêmes. Ça ne sait rien foutre et ça ne veut écouter personne. Demande voir aux gars de mon escouade si je leur fais pas du riz au chocolat maous…

— Mais c’est pas du riz, se défend encore Bouffioux, plus mollement, c’est du rata.

— Ça ne fait rien, intervient le cabot. T’as tort de t’obstiner. Du chocolat, c’est toujours bon… Ce soir, je becqueterai à ton escouade, tiens, tu m’feras une part…