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VENGEANCE FATALE

À ce nom Louis ne put retenir un cri d’angoisse. Ce cri confirma Puivert dans son opinion, que l’étudiant devait être au fait des principaux détails de la fatale nuit où il était devenu orphelin. Ce dernier se remit vite de cette faiblesse passagère.

— Viens vite au fait, dit-il ; toute son histoire ne m’intéresse guère. Ce que je veux savoir, ce sont les faits de la nuit du 29 décembre mil huit cent trente-huit.

— Voici. Peu de temps après, Darcy acheta une terre à Ste-Anne et me chargea de la cultiver pour lui. Moi-même je vendis la mienne à la Pointe-Claire, et j’allai m’établir sur la propriété que j’occupe encore aujourd’hui.

Plus tard, il me fit mander pour une affaire très grave, disait-il, mais sans m’expliquer ce qu’il voulait de moi. Je dois vous dire ici, qu’avant son mariage votre mère était venue à Montréal, où elle rencontra Raoul de Lagusse, qui s’éprit immédiatement pour elle d’une très vive affection.

— Je sais cela, répondit Louis.

— Mais ce que vous devez ignorer, c’est que le sentiment d’amour qu’il entretenait pour votre mère le porta jusqu’à la demander en mariage. Malheureusement elle était engagée avec votre père, qu’elle épousa en effet et qui fut tué au feu de Saint-Denis.

— Par Raoul de Lagusse ? interrompit Louis.

— C’est ce que j’ignore, répondit le fermier.

— Moi j’en suis sûr. Continuez.

— Après la mort de votre père, Raoul de Lagusse s’absenta pendant quelque temps du Canada à cause de la défaite des patriotes. Mais cette absence ne fut