Aller au contenu

Page:Dostoïevski - Crime et chatiment, tome 1.djvu/13

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

réfléchir. Ensuite, elle montra la porte de la chambre à son visiteur et lui dit en s’effaçant pour le laisser passer devant elle :

— Entrez, batuchka.

La petite pièce dans laquelle le jeune homme fut introduit était tapissée de papier jaune ; il y avait des géraniums et des rideaux de mousseline aux fenêtres ; le soleil couchant jetait sur tout cela une lumière crue. « Alors, sans doute, le soleil éclairera de la même manière !… » se dit tout à coup Raskolnikoff, et il promena rapidement ses yeux autour de lui pour se rendre compte des objets environnants et les graver dans sa mémoire. Mais la chambre ne renfermait rien de particulier. Les meubles, en bois jaune, étaient tous très-vieux. Un divan avec un grand dossier renversé, une table de forme ovale vis-à-vis du divan, une toilette et une glace adossées au trumeau, des chaises le long des murs, deux ou trois gravures sans valeur qui représentaient des demoiselles allemandes avec des oiseaux dans les mains, — voilà à quoi se réduisait l’ameublement.

Dans un coin, devant une petite image, brûlait une lampe. Mobilier et parquet reluisaient de propreté. « C’est Élisabeth qui fait le ménage », pensa le jeune homme. On n’aurait pu découvrir un grain de poussière dans tout l’appartement. « Il faut aller chez ces méchantes vieilles veuves pour voir une propreté pareille », continua à part soi Raskolnikoff, et il regarda avec curiosité le rideau d’indienne qui masquait la porte donnant accès à une seconde petite pièce : dans cette dernière, où il n’avait jamais mis le pied, se trouvaient le lit et la commode de la vieille. Tout le logement se composait de ces deux chambres.

— Que voulez-vous ? demanda sèchement la maîtresse du logis, qui, après avoir suivi son visiteur, vint se planter vis-à-vis de lui pour l’examiner face à face.

— Je suis venu engager quelque chose, voilà !