Page:Dostoïevski - Crime et chatiment, tome 2.djvu/259

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déteste ce bruit d’arbres la nuit, dans la tempête et dans les ténèbres ! » Il se rappela que tout à l’heure, en passant à côté du parc Pétrowsky, il avait éprouvé la même impression pénible. Ensuite il songea à la Petite-Néwa, et il eut de nouveau le frisson qui l’avait saisi tantôt quand, debout sur le pont, il contemplait la rivière. « Jamais de ma vie je n’ai aimé l’eau, même dans les paysages », pensa-t-il, et tout à coup une idée étrange le fit sourire : « Il me semble qu’à présent je devrais me moquer de l’esthétique et du confort, pourtant me voici devenu aussi difficile que l’animal qui a toujours soin de choisir sa place… en pareille occurrence. Si j’étais allé tantôt à Pétrowsky Ostroff ? Apparemment j’ai eu peur du froid et de l’obscurité, hé ! hé ! Il me faut des sensations agréables !… Mais pourquoi ne pas éteindre la bougie ? » (Il la souffla.) « Mes voisins sont couchés », ajouta-t-il, ne voyant point de lumière dans la fente de la cloison. « C’est maintenant, Marfa Pétrovna, que votre visite aurait de l’à-propos. Il fait noir, le lieu est propice, la situation est exceptionnelle. Et, justement, vous ne viendrez pas… »

Le sommeil continuait à le fuir. Peu à peu l’image de Dounetchka se dressa devant lui, et un tremblement soudain agita ses membres au souvenir de la scène qu’il avait eue avec la jeune fille peu d’heures auparavant. « Non, ne pensons plus à cela. Chose bizarre, je n’ai jamais beaucoup haï personne, je n’ai même jamais éprouvé un vif désir de me venger de qui que ce soit, c’est mauvais signe, mauvais signe ! Jamais non plus je n’ai été ni querelleur, ni violent — voilà encore un mauvais signe ! Mais que de promesses je lui ai faites tantôt ! Elle m’aurait mené loin… » Il se tut et serra les dents. Son imagination lui montra de nouveau Dounetchka, telle exactement qu’elle était quand, après avoir lâché le revolver, incapable désormais de résistance, elle fixait sur lui un regard épouvanté. Il se rappela quelle pitié il avait eue d’elle en ce moment, comme il s’était senti