Page:Dostoïevski - Le Sous-sol, 1909.djvu/257

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— Elena Ivanovna ! est-ce bien vous que j’entends parler ainsi ? m’écriai-je d’un ton pathétique. Quel est le méchant homme qui vous a mis de pareilles idées en tête ? Mais il est impossible d’obtenir le divorce pour une cause aussi peu sérieuse que l’absence d’appointements. Et ce pauvre Ivan Matveïtch, qui brûle encore d’amour pour vous, au fond de son crocodile ! Il en fond comme un morceau de sucre. Hier soir pendant que vous vous amusiez au bal masqué, ne disait-il pas qu’en cas d’extrémité, il finirait par se décider à vous prendre, comme son épouse légitime, près de lui, au fond du crocodile, d’autant plus qu’il y a de la place pour deux personnes et même pour trois…

Et je lui rapportai aussitôt toute cette intéressante partie de l’entretien que j’avais eu la veille avec son mari.

— Comment ! fit-elle stupéfaite, comment ! vous voulez aussi que j’aille rejoindre Ivan Matveïtch dans ce crocodile ? Quelle idée ! Comment voulez-vous que j’entre là-dedans avec mon chapeau et ma crinoline ? Dieu ! mais c’est absurde ! Quelle figure ferais-je en y entrant, si quelqu’un me voyait ? C’est ridicule. Et comment me nourrirais-je… Et… comment ferais-je si je… En voilà une invention ! Et quelles distractions y trouver ? Et vous me dites que ça sent le caoutchouc ! Et il me faudra rester couchée près de lui quand nous serons en bisbille ! Fi ! quelle horreur !