Page:Dostoïevsky - L’Esprit souterrain, trad. Halpérine et Morice, 1886.djvu/279

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y sont : mais tu ne les auras pas, tu-ne-les-au-ras-pas, tant que tu ne seras pas venu respectueusement, la tête basse, me demander pardon.

― Cela ne se peut pas, répondit-il avec une assurance surnaturelle.

― Ça suffit, criai-je, je te jure que tu ne les auras pas !

― Il n’y a pas de quoi vous demander pardon, ― continua-t-il comme s’il ne s’apercevait même pas de mes cris, ― c’est vous qui m’avez appelé « bourreau », et je pourrais aller porter plainte chez le commissaire.

― Vas-y donc, hurlai-je, vas-y tout de suite, à la minute, à la seconde, bourreau ! bourreau ! bourreau !

Mais il me regarda à peine, gagna la porte, et sans plus m’écouter, sans se retourner, rentra tranquillement chez lui.

― Sans Lisa, rien de tout cela ne serait arrivé, pensai-je.

Je restai un moment immobile, dans une pose digne et solennelle ; mais mon cœur battait faiblement tant j’étais ému. Puis j’allai moi-même chez Apollon.