— Je crains, Charles, dit ma mère, que la garde-robe de Roddy ne soit d’un campagnard.
— Nous aurons bientôt pourvu à cela, dès que nous serons arrivés à la ville. Nous verrons ce que Stultz et Weston sont capables de faire pour lui, répondit mon oncle. Nous le tiendrons à l’écart jusqu’à ce qu’il ait quelques habits à mettre.
Cette façon de traiter mes meilleurs habits du dimanche amena de la rougeur aux joues de ma mère, mais mon oncle s’en aperçut à l’instant, car il avait le coup d’œil le plus prompt à remarquer les moindres bagatelles.
— Ces habits sont très convenables, à Friar’s Oak, ma sœur Mary, dit-il. Néanmoins, vous devez comprendre qu’au Mail, ils pourraient avoir l’air rococo. Si vous le laissez entre mes mains, je me charge de régler l’affaire.
— Combien faut-il par an à un jeune homme, demanda mon père, pour s’habiller ?
— Avec de la prudence et des soins, bien entendu, un jeune homme à la mode peut y suffire avec huit cents livres par an, répondit mon oncle.
Je vis la figure de mon pauvre père s’allonger.
— Je crains, monsieur, dit-il, que Roddy soit obligé de garder ses habits faits à la campagne. Même avec l’argent de mes parts de prise…
— Bah ! bah ! s’écria mon oncle, je dois déjà à Weston un peu plus d’un millier de livres. Qu’est-ce que peuvent y faire quelques centaines de plus ? Si mon neveu vient avec moi, c’est à moi à m’occuper de lui. C’est une affaire entendue et je dois me refuser à toute discussion sur ce point.
Et il agita ses mains blanches, comme pour dissiper toute opposition. Mes parents voulurent lui adresser quelques remerciements, mais il y coupa court.