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jim harrison, boxeur

la chance d’assister à une lutte qui pouvait se terminer en un seul round, chose impossible à prévoir.

On ne saurait imaginer une foule plus joyeuse, plus cordiale.

Les plaisanteries se croisaient, aussi dru que les nuages de poussière, et devant chaque auberge du bord de la route, le patron et les garçons se tenaient prêts avec leurs plateaux chargés de pots débordants de mousse pour désaltérer ces bouches pressées.

Ces haltes pour boire la bière, cette rude camaraderie, la cordialité, les incommodités accueillies par des éclats de rire, cette impatience de voir la lutte, étaient autant de traits, qui pouvaient être qualifiés de vulgaires, de populaires, par les gens au goût difficile, mais quant à moi, maintenant que je prête l’oreille aux lointains et vagues échos de notre temps passé, tout cela me paraît constituer l’ossature qui formait la charpente si solide et si virile dont cette race antique était constituée.

Mais hélas ! quelle chance avions-nous de gagner du terrain ?

Mon oncle, avec toute son habileté, n’arrivait pas à apercevoir un passage dans cette masse en mouvement.

Il fallut garder notre rang dans la file et ramper comme des escargots de Reigate à Horley, puis à la Croix de Povey, puis à la bruyère de Lowfield, pendant que le jour faisait place au crépuscule et qu’à celui-ci succédait la nuit.

Au pont de Kimberham, toutes les lanternes furent allumées.

C’était un merveilleux spectacle que cette courbe de la route qui s’étendait devant nous, que les replis de ce serpent aux écailles dorées qui se déroulait dans l’obscurité.