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LA NOUVELLE CHRONIQUE

l’ouest de l’Angleterre. Un bon nombre de mes lecteurs se rappellent peut-être ce qu’à l’époque on nomma « l’horrible drame de Cornouailles », et dont la presse de Londres n’eut d’ailleurs qu’une idée très imparfaite. Bien des années ont passé : je donnerai aujourd’hui la véritable version de cette inconcevable affaire.

J’ai dit que la campagne est, dans cette région, parsemée de villages que signalent les tours des églises. L’un des plus proches, le hameau de Tredannick Wartha, groupait autour d’une vieille église moussue ses cottages où vit une population de deux cents âmes. Le vicaire de la paroisse, M. Roundhay, se piquant de quelque savoir archéologique, Holmes avait fait sa connaissance. C’était un homme entre deux âges, corpulent, affable et d’une vaste érudition locale. En allant, sur son invitation, prendre le thé chez lui, nous y avions également connu un M. Mortimer Tregennis, gentleman indépendant auquel il louait deux pièces de la maison, ce qui lui permettait d’accroître ses modestes ressources. Au surplus, étant célibataire et trop largement logé, il trouvait dans cet arrangement un agrément personnel, bien qu’il n’eût à peu près rien de commun avec son locataire, personnage brun, maigre, portant lunettes, et voûté au point d’en paraître difforme. Je me souviens que durant notre visite, M. Mortimer Tregennis, renfermé, triste, les yeux distraits, semblait penser à tout autre chose.

Tels étaient les deux hommes qui entrèrent à l’improviste dans notre petit salon, le mardi 16 mars, alors qu’ayant terminé notre déjeuner du matin nous fumions, Holmes et moi, avant d’aller faire notre excursion quotidienne dans la lande.

— Monsieur Holmes, dit le vicaire d’une voix émue, il s’est passé, durant la nuit, un événement tragique.