Page:Doyle - Le Monde perdu.djvu/134

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qui y assistèrent. (Ouf ! confrère Macdona, quel exorde !) On n’y devait admettre en principe que les membres de l’Institut et leurs amis. Mais ce terme d’« amis » est élastique, et, bien avant l’ouverture de la séance, annoncée pour huit heures, on s’écrasait sur tous les points de la vaste salle. Cependant, à huit heures moins un quart, le grand public, redoutant à tort de se voir exclu, força les portes, après une longue mêlée ou furent blessées plusieurs personnes, notamment l’Inspecteur Scoble, de la division H., qui eut la jambe brisée. Après cette invasion que rien ne justifiait, et qui non seulement remplit les couloirs mais ne respecta même pas les places de la presse, on peut évaluer à près de dix mille le nombre des gens qui attendaient les explorateurs. Quand enfin ils apparurent, ils prirent place sur une estrade où se trouvaient déjà les plus illustres savants d’Angleterre, de France et d’Allemagne, à qui s’était joint, pour la Suède, le professeur Sergius, l’illustre zoologiste de l’Université d’Upsal. Les quatre héros de la soirée furent, à leur entrée, l’objet d’une démonstration chaleureuse : toute l’assistance, debout, les acclama plusieurs minutes. Cependant, un observateur avisé aurait pu discerner au milieu des bravos certains signes d’opposition et prévoir une soirée plus animée qu’unanime ; mais nul dans la salle, n’aurait soupçonné le tour que les choses allaient prendre.

« Inutile de décrire au physique les quatre voyageurs : tous les journaux ont ces temps-ci, publié leurs photographies. Les fatigues qu’ils ont dû, paraît-il, endurer, n’ont pas laissé chez eux beaucoup de traces. La barbe du professeur Challenger peut avoir exagéré son hérissement, le visage du professeur Summerlee son ascétisme, celui de lord John Roxton sa maigreur, tous les trois peuvent avoir le teint plus brûlé qu’au moment où ils quittèrent nos rivages, mais tous ils semblent en excellente santé. Quant à notre représentant E. D. Malone, l’athlète et le champion de football rugby universellement connu, il paraît plus entraîné que jamais ; et tandis qu’il promenait son regard sur la foule, un sourire de satisfaction envahissait sa bonne figure bourgeoise. (Vous, Mac, si jamais je vous attrape dans un coin !…)

« Quand, le calme rétabli et l’ovation terminée, les assistants eurent repris leurs sièges, le président, duc de Durham, prononça quelques paroles. Il ne voulait pas faire attendre plus d’une minute à l’assemblée le plaisir que lui promettait cette séance. Il n’avait pas à préjuger ce qu’allait dire, au nom du comité, le professeur Summerlee ; mais déjà la rumeur courante affirmait l’extraordinaire succès de l’expédition. (Applaudissements.) Apparemment, les temps de romanesque n’étaient pas révolus ; il y avait un terrain sur lequel pouvaient se rencontrer les plus extravagantes imaginations du romancier et les découvertes du chercheur en quête de vérité scientifique. L’orateur se réjouissait avec toute l’assistance de voir ces messieurs revenus sains et saufs, ayant accompli leur difficile et dangereuse tâche, car le désastre de l’expédition eût sans contredit infligé une perte irréparable à la cause de la science zoologique. (Applau-



RÉSUMÉ (suite)

que le « Monde perdu » est habité par des hommes. De retour au camp, – après n’avoir échappé que par miracle à une terrifiante poursuite – il le trouve lamentablement dévasté. Une large flaque de sang rougit l’herbe. Summerlee, Challenger et lord Roxton ont disparu. Quelques heures plus tard, néanmoins, ce dernier revient au campement et raconte au journaliste qu’il a été enlevé, ainsi que ses deux compagnons, par des hommes-singes. Il a pu leur échapper mais Summerlee et Challenger sont restés prisonniers. Roxton et Malone, armés de rifles, parviennent à les délivrer, ainsi que quatre hommes natifs du « Monde perdu », qui étaient prisonniers aussi, et dont la tribu est en butte à la persécution des hommes-singes. Les Européens font avec cette tribu une alliance qui a pour résultat une hécatombe[1] d’anthropoïdes.

Ils songent alors au retour. Challenger imagine de gonfler une poche stomacale extraite du corps d’un gigantesque poisson-lézard avec les gaz qui s’échappent en bulles d’un étang. Mais ce ballon improvisé leur échappe. Heureusement, l’un des chefs de la tribu qu’ils ont secouru leur indique une voie souterraine qui leur permettra de gagner le pied de la falaise. En secret, car les indigènes voudraient garder parmi eux ces précieux alliés, ils s’engagent dans l’obscur chemin et descendent vers la plaine. Ils retrouvent Zambo et une troupe d’indiens venus à leur secours et reprennent le chemin de l’Europe.



  1. WS : hétacombe ->hécatombe