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épilogue




Le 19 août 1870, aux premières heures de l’aube, un funèbre cortège sortait de Metz par la porte de France, et, s’engageant lentement sur le chemin de Devant-les-Ponts, gravissait les hauteurs de Plappeville, se dirigeant vers Amanvilliers.

C’était un long défilé de voitures recouvertes de bâches brunes et portant la croix de la Convention de Genève.

Des infirmiers, des soldats du train, des Frères des écoles chrétiennes marchaient le long du convoi ; sur les sièges, près des conducteurs, des Sœurs de charité, assises, égrenaient des chapelets.

Des médecins militaires chevauchaient le long de la colonne et pressaient la marche des fourgons ; car elle était abondante, la lugubre moisson de blessés là-haut, sur les plateaux.

En avant de la première voiture, un maréchal des logis d’artillerie marchait à grandes enjambées ; sa tunique était couverte de boue et un bandeau sanglant entourait son front ; les yeux fixés sur la sombre dentelure des bois, il boitait en marchant, et de temps en temps la douleur lui arrachait un hurlement ; il se baissait alors, jetait avec un bidon quelques gouttes d’eau sur un pansement qui lui serrait la jambe au-dessous du genou, et repartait, les poings serrés, les traits contractés par la souffrance.

C’était Mahurec.

Derrière lui, Georges Cardignac, très pâle, hâtait le pas ; avec ses yeux