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Page:Drieu La Rochelle - Les Chiens de paille, 1964.djvu/80

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est du Vermandois. Mais je suis né à Paris.

— Nous nous appelons Susini.

— Vous êtes Corses ?

— Moi je le suis, dit le petit gras, moi Charles Susini, mais lui qui n’est que mon demi-frère n’est qu’à moitié Corse, Raymond.

Raymond était décidément plus grand et moins gras que Charles. Il avait un visage plus large, plus musclé ; entre ses lèvres épaisses, sous son nez un peu camus, il montrait des dents carrées.

— Si vous êtes évadé, vous ne craignez pas d’être pincé ? demanda Charles avec des yeux gais et complices.

— Il y en a tant. J’ai des faux papiers.

— Ah bon, alors…

— Non, je vous ai donné mon vrai nom.

— Vous avez confiance en nous ?

— Oui.

Les deux frères se regardèrent en riant.

— Ils sont bons, vos faux papiers ?

— Ce sont les communistes qui me les ont donnés.

— Vous n’êtes pas communiste, décida Raymond.

— Non.

— Vous vous occupez de politique ?

Constant, qui se prêtait gentiment à l’interrogatoire, devint sérieux.

— Je méprise ceux qui n’en font pas, j’ai pitié de ceux qui en font.

— Ah bien alors, s’écria Charles, nous sommes