Page:Du Calvet - Appel à la justice de l'État, 1784.djvu/181

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où ils résident encore ; la plupart, par le chemin battu, se rendirent tranquillement chez eux, d’où le gouvernement ne fit jamais même mine de vouloir les relancer : apathie de l’administration, qui attestait non seulement sa faiblesse présente, mais encore l’injustice préliminaire, qui, sans titres légaux, les avait dépouillées de leur liberté : je dis, sans titres légaux ; car dans les prémices, comme dans l’époque finale de tous ces emprisonnements, il n’y eut jamais de procédure civile, ni un seul jugement pour les justifier, même pour la montre.

La censure s’inscrit tous les jours, avec un plaisir affecté d’humanité, ou de malice, (cela dépend) contre ces fameuses lettres-de-cachet, qui, sous la dictée du despotisme, règnent en France ; mais depuis plus d’un siècle et demi que durant la fondation de la colonie jusqu’à la conquête, on compte moins de ces emprisonnements d’emblée que n’en a produits une seule semaine de l’administration du général Haldimand. Dans ce long intervalle, les Canadiens, jouissants des douceurs d’un gouvernement effectivement modéré, cultivaient leurs domaines en paix, et en toute sûreté, sans avoir à trembler pour leur liberté. Infortuné peuple ! de quel crime étions-nous coupables pour être vaincus ? On a lu avec fureur l’histoire de la Bastille, nuancée de ses couleurs naturelles,