Page:Du Calvet - Appel à la justice de l'État, 1784.djvu/34

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tout un peuple que de faire asseoir sur les fleurs de lys, pour le juger, un charcutier de profession : mais tout est bon pour des Canadiens. Au moins à un jugement si inique, après une dégradation infamante, on se serait fait un devoir d’État de le renvoyer à ses premiers bistouris et à ses seringues : mais à Québec, sa tranchante et sanglante décision fit loi, dont le gouverneur Haldimand lui-même ne rougit pas d’être l’écho.

Ce général ne siégeait jamais et il ne siégea même jamais plus depuis sur les tribunaux : aucune autre cause ne l’appelait alors à la cour ; mais il s’offrait, dans M. du Calvet, ainsi indéfendu, une victime du choix de sa vengeance : il ne put se refuser au plaisir délicat de le frapper lui-même et de l’accabler. Ce Suisse, qui avait fait son apprentissage de jurisprudence française autour d’une ferme de son pays et y avait cultivé ses premiers essais civils au milieu des camps et des armées de l’Angleterre en Amérique, prononça, lui-même, une sentence complète de condamnation immédiate contre M. du Calvet, qui l’exécution immédiate et arbitraire qui s’en fit, toute voie d’appel au Conseil du roi ayant été rejetée, essuya une perte d’environ 5000 livres sterling. En Cafrerie, si cependant il y existe des cours de judicature, peut-être rougiraient-elles de déshonorer le nom sacré de la Justice par des injustices si décidées ; mais si, au lieu de magistrats cafres, il n’y règne que des brigands, au moins leurs brigandages ne pourraient se signaler par des extorsions et des