Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/152

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routine autant que par amour-propre national, la machine qui reproduisait les signaux de Chappe. Or nos dépêches pour l’étranger ne pouvaient parvenir lisiblement que jusqu’à nos frontières ; là il fallait les traduire en langage Morse afin qu’elles pussent continuer leur route. Ce fut surtout pendant la guerre de Crimée que cet inconvénient apparut dans toute sa gravité. Les dépêches parties de Bucharest arrivaient jour et nuit par centaines au bureau de Strasbourg. Là elles subissaient forcément un temps d’arrêt, puisque nos appareils ne reproduisaient pas les signes des télégraphes étrangers. Il n’existait pas à ce moment d’appareil Morse en France et nul mécanicien n’en fabriquait.

La direction générale se mit en quête et on trouva deux de ces appareils en assez piteux état au fond d’un magasin de l’administration. On les fit réparer tant bien que mal, on en étudia la manipulation, on forma des élèves qui devinrent bientôt des maîtres, on commanda un nombre d’appareils suffisant afin de pouvoir se mettre en rapport télégraphique avec l’étranger, et l’on arriva à substituer très-promptement la machine de Morse à nos vieux engins français devenus illusoires. Si l’on réfléchit que chaque appareil différent exige une manipulation absolument spéciale, on comprendra quelle activité il a fallu déployer pour instruire rapidement tout un personnel à une manœuvre nouvelle et dont il ne soupçonnait pas le premier geste. Cette transformation a été extrêmement heureuse, car elle a donné plus de rapidité, de sûreté et d’étendue à nos communications.

L’appareil Morse, qui, dans le principe, traçait des lignes et des points à l’aide d’un poinçon sur une bande de papier, fait aujourd’hui les mêmes signes avec de l’encre, ce qui évite les déchirures et diminue les causes d’erreur. Il a un alphabet particulier où chaque lettre est composée d’un certain nombre de points et de tirets.