Page:Du Camp - Paris, tome 2.djvu/209

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habitude ? Les rôles de France ont, à ce qu’il paraît, un goût fort apprécié, et ils remplacent avantageusement ces tablettes en tabac de Virginie saturé de réglisse et de vin d’Espagne qu’on vendait jadis sous main et fort cher. C’est une partie importante de la fabrication du Gros-Caillou, et plusieurs ateliers y sont occupés. Toute personne qui a vu un cordier faire une corde à la manivelle sait comment on prépare les rôles, qui sont de deux espèces : les menus filés et les rôles ordinaires. Les feuilles, préalablement bien mouillées et écôtées, sont amorcées sur un rouet tournant avec une extrême facilité ; on file menu, et la corde en tabac ainsi obtenue est coupée à une certaine longueur qui représente un poids déterminé ; pour en augmenter la saveur et la défendre contre une dessiccation trop rapide, on la plonge dans un baquet plein de jus de tabac concentré qu’on appelle la sauce. Cette opération n’est point ragoûtante à voir et ne donne qu’une envie médiocre de mâcher du tabac.

Les cordes sont alors pelotonnées en paquets, qu’on expose à l’action d’une presse hydraulique afin de leur donner une forme régulière et de n’y laisser que la quantité de jus nécessaire. Chaque paquet est ensuite méthodiquement ficelé et enfermé pendant quelques jours dans un séchoir à température moyenne. Les rôles ordinaires, plus gros, semblables à de petits cordages et additionnés de feuilles de Virginie, sont tournés de la même manière, seulement avec plus d’activité, à l’aide d’un rouet mécanique obéissant à la vapeur.

La manufacture est toujours en mouvement, et les 1 611 ouvriers qu’elle occupe ne chôment guère ; en 1868, elle a produit 2 681 497 kilogrammes de scaferlati, 1 941 059 de râpé et 241 625 de rôles. À cette fabrication il faut ajouter 43 443 700 cigares à 15, 10 et à 5 centimes, dont les premiers sont composés de