Page:Du Camp - Paris, tome 5.djvu/354

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presque toujours le même industriel qui se rend acquéreur. Les pieds sont coupés au-dessus de la cheville et expédiés dans l’Oise, à Méru, où l’on en fait des galoches pour les ouvriers qui exploitent les nombreuses tourbières du département ; quant à la tige, elle est traitée par des procédés dont je n’ai point demandé le secret, et elle produit le cuir le plus souple, le plus fin, le plus beau qu’on puisse imaginer ; plus d’une femme élégante, qui ne s’en doute guère, le porte sous forme de brodequins.

Il est bien difficile de quitter les égouts sans s’occuper de ces fameux rats dont on a tant parlé et que l’anecdote, parfaitement authentique, racontée par Magendie, a rendus populaires. Il eut besoin de rats pour ses études, il en fit prendre à Montfaucon douze que l’on enferma dans une boîte ; lorsqu’il ouvrit celle-ci au Jardin des Plantes, il n’en trouva plus que trois, fort gonflés et tout à fait repus ; dans le trajet les survivants avaient mangé leurs neuf camarades. C’est un animal féroce dans toute la force du terme ; il tient facilement tête au chat et le tue. Le rat tend à disparaître aujourd’hui de nos égouts. On ne le rencontre plus que dans de vieilles galeries en meulières ou en moellons, où il a pu se creuser une tanière ; l’enduit de ciment lisse et inattaquable qui revêt les nouveaux égouts l’en a chassé, car il ne peut trouver à s’y loger ; il habite surtout la voie publique, dans les resserres des halles, des marchés, aux abattoirs, dans les gargouilles faisant suite « au dauphin » des maisons particulières, dans les ateliers d’équarrissage et aux voiries de Bondy.

C’est un nouveau venu parmi nous ; il a envahi la France dans la seconde moitié du dix-huitième siècle. Pallas fixe la date de l’entrée du rat en Europe ; il pénétra à Samara dans l’été de 1766. C’était une émigration déterminée sans doute par une chaleur exces-