On s’imagine généralement que le Mont-de-Piété fait des opérations d’autant plus fréquentes et des affaires d’autant plus fructueuses, que le mouvement commercial est arrêté par une crise, que les ouvriers sont en chômage, que la politique fait des siennes et neutralise les efforts de l’industrie. Rien n’est plus faux ; c’est exactement le contraire qui se produit. Le Mont-de-Piété suit fidèlement toutes les oscillations de la prospérité publique, il dort et s’éveille en même temps qu’elle ; aussi bien que la cote de la Bourse, le tableau journalier des engagements et des dégagements est un infaillible thermomètre.
Cela s’explique par ce fait assez peu connu, que le Mont-de-Piété est le banquier du petit commerce et surtout de la petite fabrication de Paris ; c’est de là, et non d’ailleurs, que lui vient sa clientèle la plus sûre, la plus nombreuse et je dirai la plus reconnaissante, car sans lui cette portion extrêmement intéressante de notre population serait dévorée vivante par la race des argentiers interlopes, des usuriers déguisés, des escompteurs à taux impudents, qui exigeraient des intérêts bien autrement élevés que les 9 1/2 pour 100 déjà excessifs dont on frappe le nantissement. On le voit bien aux deux grandes échéances de l’année commerciale, qui sont janvier et juillet : le compte de ces deux mois-là est toujours plus chargé que celui des autres.
Une autre cause détermine aussi pendant le mois de décembre une activité extraordinaire dans les bureaux du Mont-de-Piété : c’est l’autorisation donnée à un grand nombre de fabricants de s’établir sur les boulevards