Page:Du Camp - Paris, tome 5.djvu/72

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était puéril de s’arrêter devant des considérations spécieuses qui n’ont fait reculer ni la Suisse, ni l’Allemagne, ni la Suède, ni tant d’autres pays. Après la révolution de 1848, on faillit résoudre cette grosse question ; l’obligation était inscrite dans les projets de loi successivement présentés par M. Carnot (5 juin), par M. Barthélémy Saint-Ililaire (13 décembre), par M. Jules Simon (5 février 1849). Ces différents projets furent absorbés et profondément modifiés par la loi du 15 mars 1850, — la loi Falloux, — qui établissait la liberté de l’enseignement, mais passait l’obligation sous silence, tout en assurant par l’article 14 la gratuité aux enfants indigents.

On peut savoir exactement quelle part chacun des gouvernements qui se sont succédé en France depuis soixante ans a prise à la création des écoles ; on a des documents précis qui, partant de la fin de la Restauration, aboutissent aux dernières années du second Empire. En 1829, la France possède 30 796 écoles primaires publiques, — 32 520 en 1832, — 43 843 en 1850, — 53 820 en 1868. Donc, en quarante ans, le chiffre n’a augmenté que d’un peu plus des deux tiers. Nous sommes loin encore à cette heure d’avoir atteint le nombre total des écoles qui seraient indispensables pour satisfaire aux besoins qui s’imposent chaque jour avec une intensité croissante[1].

Pour bien se rendre compte du degré d’instruction — ou d’ignorance — de notre pays, il faut jeter les yeux sur une carte dressée en 1866 au ministère de l’instruction publique, et représentant les départements teintés selon le nombre des conscrits illettrés appartenant à la

  1. Dans un rapport sur l’instruction primaire et secondaire chez les différents peuples, lu le 29 mai 1873 à l’Académie des sciences morales et politiques, M. Levasseur établit que sur quarante-cinq nations qu’il a pu étudier, la France arrive la vingtième avec une moyenne de 13 enfants inscrits aux écoles primaires par 100 habitants.