Page:Du Ryer - Dynamis, reyne de Carie, 1653.djvu/64

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Pour être le bourreau de mon ambition ?

Ta fureur me menace, orgueilleuse Proxène,

Mais hâte ma ruine, ou ta perte est prochaine.

J'ai perdu cet Amour qui serait ton appui,

Et je puis aisément te perdre avecque lui.

Non, non, ne songeons plus que nous l'avons aimée,

Et que peut-être encor notre âme en est charmée ;

Mais regardons enfin et le gouffre et l'horreur

Où peut nous faire choir sa fatale fureur.

Quoi qu'elle me promette, et que je puisse feindre,

Elle sait mes desseins, elle est toujours à craindre :

Par une prompte mort il faut m'en délivrer,

Ce destin est cruel, mais il doit m'assurer.

Tirons des grands forfaits ce qu'on peut s'en promettre ;

Ne nous ruinons pas par la peur d'en commettre.

Quiconque voulant vaincre ou voulant se venger,

N'est qu'à demi méchant, est toujours en danger.

Et d'où vient si souvent que tant de grands courages

Ont fait dans leurs desseins de funestes naufrages ?

C'est que leurs coeurs craintifs à la pitié penchants,

N'osent être une fois entièrement méchants.

Mais je vois repasser la cruelle Proxène,

Elle prend son chemin pour aller chez la Reine.

Destins, que dois-je attendre ? Est-ce ici le moment

Où mon ambition doit choir au monument ?

Non, non, dégageons-nous de ce profond abîme,