Page:Du halde description de la chine volume 1.djvu/154

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Ces nouveaux maîtres furent soutenus par les garnisons placées en différents postes les meilleurs du pays, où sont les villes qu’on y voit encore aujourd’hui. Les Miao sse s’accoutumèrent insensiblement au joug, et maintenant ils regardent leurs mandarins comme s’ils étaient de leur nation, et ils en ont pris presque toutes les manières.

Ils n’ont pas cependant encore oublié leur patrie. On leur entend dire de quelle province et de quelle ville ils sont sortis, et combien ils comptent de générations dans la province de Koei tcheou, La plupart en comptent quatorze, quelques-uns seize, ce qui s’accorde en effet avec l’ère de Hong vou.

Quoique leur juridiction ne soit pas étendue, ils ne laissent pas d’être à leur aise ; leurs maisons sont larges, commodes, et bien entretenues ; ils jugent en première instance les causes de leurs sujets, ils ont droit de les châtier, mais non pas de les faire mourir. De leurs tribunaux on appelle immédiatement au tribunal du tchi fou, et ils ont simplement les droits de tchi hien.

Ils s’enveloppent la tête d’un morceau de toile, et ne portent qu’une espèce de pourpoint et de haut-de-chausses. Mais leurs mandarins et leurs domestiques sont vêtus comme les mandarins et les Chinois du pays, surtout quand ils vont à la ville pour visiter le tchi fou, ou quelqu’autre mandarin que ce soit.

C’est par ces mandarins Miao sse que les missionnaires qui travaillaient à la carte de ces provinces, ont eu quelque connaissance des Miao sse non soumis, qui sont dans la province de Koei tcheou vers Li ping fou, et qui occupent plus de quarante de nos lieues. Car quoi qu’ils aient côtoyé le septentrion et l’occident de leur pays, en faisant la carte des villes chinoises et des postes occupés par les soldats qui sont tout au tour, presque à la vue de leurs limites, ils n’en ont jamais vu paraître un seul.

On leur a dit que ces Miao sse non soumis appelés par les Chinois Sing miao sse ou Ye miao sse, c’est-à-dire, Miao sse sauvages, ont des maisons bâties de briques à un seul étage, et semblables à celles des Miao sse soumis. Dans le bas ils mettent le bétail, les bœufs, les vaches, les moutons, les cochons, car de ce côté-ci, on ne voit presque point d’autres animaux, pas même de chevaux, c’est ce qui fait que leurs maisons sont sales et puantes, et qu’on a de la peine à loger dans le haut, lorsqu’on n’y est pas accoutumé. Et en effet les Tartares aiment mieux loger dans de misérables casernes de soldats, que dans ces maisons, qui d’ailleurs paraissent assez bien bâties.

Ces Miao sse sont séparés en villages, et vivent dans une grande union, quoiqu’ils ne soient gouvernés que par les anciens de chaque village. Ils cultivent la terre, ils font de la toile, et des espèces de tapis qui leur servent de couvertures pendant la nuit. Cette toile n’est pas bonne, et ressemble à de méchantes mousselines : mais les tapis sont fort bien tissus. Les uns sont de soie plate de différentes couleurs, rouge, jaune, et verte, les autres de filets crus d’une espèce de chanvre