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compte, des étoffes de toutes les sortes, au Japon, aux Philippines, et à l’Europe.

Tout ce qui est nécessaire à la vie, s’y trouve en abondance. Les montagnes qui sont au midi et au couchant, sont toutes cultivées : en d’autres endroits où elles sont semées de rochers, elles fournissent des bois pour la construction des vaisseaux et des édifices. C’est dans ses lacs qu’on trouve ce poisson doré, dont je fais ailleurs la description : elle fournit d’excellentes écrevisses, et en quantité. Il y croît en certains lieux une infinité de champignons, qu’on transporte dans tout l’empire. Après les avoir confits dans le sel, on les sèche, et on les garde toute l’année. Quand on veut en faire usage, il suffit de les tenir quelque temps trempés dans l’eau, pour les rendre aussi beaux et aussi frais, que si l’on venait de les cueillir.

C’est de cette même province que viennent les meilleurs jambons. On y trouve aussi cet arbre extraordinaire appelé ou kieou mou, qui porte le suif ; et de ces arbrisseaux qui produisent une fleur très blanche, laquelle ressemblerait au jasmin, si elle n’avait pas un plus grand nombre de feuilles, et si son odeur n’était pas plus agréable. Une seule de ces fleurs suffit pour parfumer toute une maison. Aussi les Chinois en font-ils tant de cas, que pour conserver ces petits arbrisseaux, ils apportent les mêmes précautions qui sont en usage en Europe, pour préserver les orangers de la rigueur de l’hiver.

Quoiqu’on trouve ailleurs le fruit appelé pe tçi, il est bien plus commun dans cette province : il y croît dans les eaux marécageuses, et est de la grosseur d’une châtaigne. Son noyau est couvert d’une peau fort mince ; la chair en est blanche, et est pleine d’un suc agréable ; elle est ferme, et un peu aigrette.

Il y en a qui prétendent, que si l’on met une monnaie de cuivre avec ce fruit dans la bouche, les dents peuvent la rompre aussi aisément que le fruit même ; c’est ce que le père Martini assure ; mais d’autres missionnaires en ont voulu faire l’expérience, et n’ont pu y réussir.

On trouve dans tout l’empire des cannes ou des roseaux, que les Portugais ont appelés bambous ; mais le Tche kiang en est plus fourni qu’aucune autre province. Il y en a des forêts entières. Ces bambous sont d’un usage infini à la Chine, ils sont très gros et très durs : bien qu’ils soient creux en dedans, et partagés de nœuds, ils sont très forts, et soutiennent les plus lourds fardeaux. Les feuilles en sont longues et repliées vers l’extrémité. Quelque durs qu’ils soient, on ne laisse pas de les couper aisément en filets très déliés, dont on fait des nattes, des boîtes, des peignes, etc. Comme ils sont percés naturellement, ils sont très propres à faire des tuyaux, pour conduire l’eau d’un lieu à un autre, ou pour servir aux lunettes d’approche, soit comme tuyau, soit comme étui, soit comme support.