Page:Du halde description de la chine volume 1.djvu/585

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maître, une attention si respectueuse, que toutes les fois qu’il venait donner sa leçon, si c’était en été, il chargeait un domestique de le rafraîchir avec un éventail, et si c’était en hiver, il faisait étendre un double tapis sur le carreau. Il l’allait visiter quand il était malade, et lui présentait des médecines ou des bouillons de sa propre main.

Ce colao avait un fils, qui dans l’examen pour le doctorat, avait obtenu le premier rang du second ordre ; l’empereur en considération de son maître, l’éleva au second rang du premier ordre.

Ce beau naturel était soutenu d’un grand fonds de droiture et d’équité ; il avait d’ailleurs l’esprit vif et pénétrant, et une sorte d’inclination pour se rendre habile dans les sciences chinoises. Il régla que désormais ce serait aux frais de l’empereur que les licenciés se rendraient des quinze provinces à la ville impériale, pour y subir l’examen où l’on confère le degré de docteur : il assistait lui-même à cet examen.

Tous les jours, dès quatre heures du matin, il examinait et répondait les requêtes qu’on lui avait présentées la veille. Il ordonna pour la commodité du public, que tous les trois mois on imprimerait dans un livre le nom, le degré, et la patrie de chaque mandarin de l’empire ; et c’est ce qui s’observe encore aujourd’hui.

L’année onzième du cycle, les Tartares qui avaient fait une irruption dans le Leao tong, furent défaits à plate couture. L’empereur à la prière de sa mère, qui était fort affectionnée aux idoles, avait dessein d’accorder une amnistie générale dans tout l’empire ; mais son colao l’en détourna, en lui représentant que l’espérance de l’impunité ouvrirait la porte à toutes sortes de crimes, et qu’il devait imiter la conduite du seigneur du Ciel, qui tôt ou tard ne manque jamais de punir les scélérats.

On maria l’empereur l’année seizième du cycle, et aussitôt après son mariage, il créa sa femme impératrice.

L’année dix-huitième du cycle, qui était l’année mil cinq cent quatre-vingt-unième de l’ère chrétienne, mérite qu’on s’en souvienne, parce que c’est l’année où le père Michel Roger entra à la Chine. C’est le premier missionnaire de la compagnie de Jésus qui soit venu y prêcher l’Évangile.

L’année dix-neuvième il y eut une si grande stérilité dans la province de Chan si, qu’on ne peut compter le nombre de ceux qui y moururent de faim. On fit creuser en divers endroits environ soixante grandes fosses, qui contenaient chacune un millier de cadavres, et c’est pourquoi on les appelait Van gin keng.

Une femme voyant jeter dans une de ces fosses son mari, qui était mort de faim, s’y jeta aussi toute vivante. On l’en