Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/142

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

côtés de chaque étage. Celle de la ville de Nan king, dans la province de Kiang nan est la plus célèbre. On l’appelle communément la grande tour, ou la tour de porcelaine. J’en ai déjà parlé au commencement de cet ouvrage, mais la description beaucoup plus détaillée, qu’en a fait le père le Comte, mérite d’être rapportée.

« Il y a, dit ce Père, hors de la ville, et non pas en dedans, comme quelques-uns l’ont écrit, un temple que les Chinois nomment le temple de la reconnaissance, bâti par l’empereur Yong le. Il est élevé sur un massif de brique, qui forme un grand perron, entouré d’une balustrade de marbre brut ; on y monte par un escalier de dix à douze marches, qui règne tout le long. La salle qui sert de temple a cent pieds de profondeur, et porte sur une petite base de marbre, haute d’un pied, laquelle en débordant, laisse tout autour une banquette large de deux. La façade est ornée d’une galerie et de quelques piliers. Les toits (car, selon la coutume de la Chine, souvent il y en a deux, l’un qui naît de la muraille, l’autre qui la couvre) les toits, dis-je, sont de tuiles vertes, luisantes, et vernissées ; la charpente qui paraît en dedans est peinte et chargée d’une infinité de pièces différemment engagées les unes dans les autres, ce qui n’est pas un petit ornement pour les Chinois. Il est vrai que cette forêt de poutres, de tirants, de pignons, de solives, qui règnent de toutes parts, a je ne sais quoi de singulier, et de surprenant ; parce qu’on conçoit qu’il y a dans ces sortes d’ouvrages du travail, et de la dépense, quoiqu’au fond, cet embarras ne vient que de l’ignorance des ouvriers, qui n’ont encore pu trouver cette belle simplicité, qu’on remarque dans nos bâtiments, et qui en fait la solidité et la beauté.

La salle ne prend le jour que par ses portes ; il y en a trois à l’orient extrêmement grandes, par lesquelles on entre dans la fameuse tour, dont je veux parler, et qui fait partie de ce temple. Cette tour est de figure octogone, large d’environ 40 pieds, de sorte que chaque face en a quinze. Elle est entourée par dehors d’un mur de même figure, éloigné de deux toises et demie, et portant à une médiocre hauteur un toit couvert de tuiles vernissées, qui paraît naître du corps de la tour, et qui forme au-dessous une galerie assez propre. La tour a neuf étages, dont chacun est orné d’une corniche de trois pieds à la naissance des fenêtres, et distingué par des toits semblables à celui de la galerie ; à cela près qu’ils ont beaucoup moins de saillie, parce qu’ils ne sont pas soutenus d’un second mur ; ils deviennent même beaucoup plus petits, à mesure que la tour s’élève et se rétrécit.

Le mur a du moins sur le rez-de-chaussée douze pieds d’épaisseur, et plus de huit et demi par le haut. Il est incrusté de porcelaines posées de champ ; la pluie et la poussière en ont diminué la beauté, cependant il en reste encore assez pour faire juger que c’est en effet de la porcelaine, quoique grossière ; car il y a apparence que la brique depuis trois cents ans que cet ouvrage dure, n’aurait pas conservé le même éclat.

L’escalier qu’on a pratiqué en dedans est petit et incommode, parce que les degrés en sont extrêmement hauts : chaque étage est formé par de