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le corps de cette monnaie, on se servait de l’écorce de mûriers. Les Chinois n’ont garde de détruire des arbres qui leur sont si précieux : c’est de l’écorce de l’arbre nommé Cou tchu qui est assez inutile, et qui ressemble au sureau par l’abondance de sa sève, qu’on fait une sorte de papier plus fort que celui qui se fait de bambou, et c’est de cette écorce que se faisait le papier dont il s’agit.


Fabrique de la monnaie de cuivre.

La monnaie de cuivre ne se bat point comme en Europe, mais elle se jette en fonte, et ne se fabrique maintenant qu’à la cour. Il y avait autrefois dans l’empire jusqu’à 22 endroits où l’on faisait de la monnaie, mais il fallait pour cela un ordre de l’empereur ; et dans le temps même qu’il y avait des princes si puissants, que ne se contentant point du titre de duc, ils prirent la qualité de roi, aucun d’eux n’osa jamais s’attribuer le droit de fabriquer de la monnaie pour ses États : elle avait toujours la marque qui désignait l’empereur régnant, quelque faible que fût son autorité.

On peut juger combien il y aurait de faux monnayeurs à la Chine, si l’argent était monnaie de même que le cuivre puisque les deniers de cuivre ont souvent été altérés par les Chinois. Ceux qui font ce métier, marquent la fausse monnaie des mêmes caractères qui se trouvent sur la véritable, mais le métal qu’ils emploient est moins pur, et le poids bien plus léger. S’ils sont découverts, ils doivent être punis de mort selon les lois. Il y a eu cependant des princes qui se sont contentés de leur faire couper le poing, et d’autres qui les ont simplement condamnés à l’exil.

Quelques-uns même, dans les temps où cette petite monnaie était extrêmement rare, ont fermé les yeux sur ce désordre, jusqu’à ce que ces monnaies contrefaites fussent répandues dans tout l’empire. Alors ils les confisquaient pour les mettre sur le pied de la vraie monnaie impériale.

Comme les petits deniers ne sont plus maintenant d’usage, ceux qui en ont les battent avec le marteau, et les élargissent jusqu’à ce qu’ils soient de la grandeur des deniers courants. Ils les mettent dans une enfilade de ces deniers, qui étant pressés les uns contre les autres, ne sont point aperçus des marchands. Il y en a qui poussent la fraude jusqu’à couper du carton en forme de deniers, qu’ils mettent de côté de d’autre dans l’enfilade, et l’on ne s’aperçoit de la supercherie, que quand on donne les pièces en détail.

Parmi les monnaies anciennes qui ont eu cours à la Chine, j’en ai fait graver plusieurs dont on ne peut pas donner des connaissances certaines. Les unes sont des pays étrangers, sans qu’on puisse savoir quels étaient ces pays, parce que les Chinois défigurent tellement les noms, qu’ils sont tout à fait méconnaissables. Par exemple ils appellent la Hollande le royaume des Rousseaux Hung mao koue, et cela, parce qu’ils ont vu des Hollandais qui avaient les cheveux blonds, et la barbe un peu rousse. Lorsqu’ils désignent de la sorte un pays, il n’est pas possible de le reconnaître.

Il y a d’autres monnaies dont l’origine est très incertaine, on conjecture seulement qu’elles sont, ou des Tartares de Leao tong qui pendant un temps ont été les maîtres de la province de Pe tche li, ou bien de quelques grands