Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/359

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des Coréens, et après divers essais on y réussit ; mais on ne fut bien content que sur la fin de la même dynastie, vers l’an 900 de J.-C. car ce ne fut qu’en ce temps-là qu’on vint à bout de faire la belle encre, telle qu’elle est maintenant en usage.

En année 1070 de l’ère chrétienne, sous le règne de Chin tsong, on raffina encore sur la matière de l’encre qu’on nomma impériale, yu me, parce qu’on s’en servait dans le palais. Le noir de fumée qui y entrait, coûtait plus à ramasser, et était beaucoup plus fin ; on ne brûlait plus de simples pins, comme auparavant ; mais on brûlait de l’huile dans des lampes à plusieurs mèches : la fumée se rassemblait sous un petit ciel d’airain, et en se condensant, elle formait la suie qu’on désirait. En la malaxant, on y ajoutait du musc, pour lui donner une bonne odeur.

Notre auteur ne dit point quelle sorte d’huile on y employait, ni de quelle façon on ménageait la matière, pour avoir plus de noir, et mieux conditionné ; car il y a des règles à observer pour tout cela : selon les apparences on se servait de l’huile de gergelin. L’huile d’olive ou de noix, qui n’est point en usage à la Chine, serait sans doute meilleure.

Un autre livre chinois, intitulé, la manière de faire de l’encre, donne une recette pour en faire de bonne, où il fait entrer des drogues, qu’il n’est pas aisé de faire connaître en Europe.

On prend, dit-il, 1° dix onces de noir de fumée, ou de suie tirée des pins. 2° Des plantes ho hiang, et kan sung. 3° On y joint du suc de gingembre. 4° Des gousses ou siliques, nommées tchu hia tsao ko. On fait d’abord bouillir dans de l’eau ces quatre derniers ingrédients ; lorsque par la cuisson la vertu des végétaux en aura été tirée, on jette le marc. Cette liqueur déjà épaissie, étant rassise et clarifiée, se remet sur le feu pour lui donner la consistance d’une pâte, et sur le poids de dix onces de cette mixtion, on dissout quatre onces de la colle nommée O kiao, où l’on aura incorporé trois feuilles d’or et deux d’argent. Quand tout est ainsi préparé, on y mêle les dix onces de noir de fumée, afin d’en former un corps. Cette composition doit être longtemps battue avec l’espatule. Enfin, on la jette dans des moules, pour en former des tablettes. Peu après il faut enterrer l’encre dans un long espace plein de cendres froides, où elle restera ensevelie cinq jours durant le printemps ; trois jours, si c’est en été ; sept jours en automne, et dix en hiver ; et c’est la dernière façon qu’on lui donne.

Ces connaissances sont assez imparfaites, parce qu’il n’est pas aisé de savoir quelles sont ces plantes désignées par des noms chinois. Un de nos missionnaires m’a envoyé ses conjectures, qui peuvent aider à les découvrir, s’il y en a de semblables en Europe, ou du moins à leur en substituer d’autres, capables de donner à l’encre du corps, de l’odeur, et du lustre.

1° Selon les dictionnaires chinois, ho hiang est une plante médicinale aromatique. Elle a les qualités intrinsèques du sou ho, autre plante dont on tire une espèce d’huile qui se vend à Peking, et que les marchands mêlent souvent