Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/753

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à cet effet, sont devenus muets. Il fait sentir qu’une autorité redoutable les intimide. Cela est contre les ministres, et particulièrement contre Ouang ngan ché. Il exhorte le prince à soutenir l’autorité et la liberté de ces tribunaux, à les remplir de gens de poids et de probité, dont les lumières lui soient utiles, et dont l’inébranlable fermeté tienne en respect les ministres. Comme on a déjà vu ces matières traitées dans divers discours, et que celui-ci de Sou ché est long, je n’en donne ici que le précis sans le traduire.


Quelques avantages qu’avait eu l’empereur Chin tsong contre une nation voisine, avaient remis en goût de faire la guerre. Tchang fang ping, qui était en place, résolut de l’en dissuader par une remontrance ; comme il n’écrivait pas bien, il s’adressa à Sou ché, qui lui composa la pièce suivante.


Prince, aimer la guerre et aimer les femmes, sont deux passions qui paraissent bien éloignées. On les compare cependant, et réellement elles ont du moins ce rapport, que comme celle-ci nuit à la santé en bien des manières, et qu’un prince qui en est possédé, abrège ses jours ; de même celle-là nuit à l’État par bien des endroits ; et sa perte est comme certaine, quand le prince s’y abandonne. Nos anciens et sages rois ne faisaient jamais la guerre, que quand ils ne pouvaient absolument s’en dispenser. S’ils avaient l’avantage sur l’ennemi, le fruit de leur victoire était une longue et heureuse paix ; et s’ils avaient du dessous, ce qu’ils en souffraient n’allait pas loin, du moins n’aboutissait jamais aux derniers malheurs. Dans les âges postérieurs on en use autrement. Nos princes font la guerre, parce qu’ils veulent la faire, et sans aucune nécessité. Aussi, soit qu’ils vainquent ou qu’ils soient vaincus, la guerre est toujours très pernicieuse. Sont-ils vainqueurs ? Les fâcheuses suites de la guerre en viennent tant soit peu plus tard ; mais elles n’en sont que plus funestes. Sont-ils vaincus ? Leur défaite a toujours des effets fort tristes ; mais cependant encore moins[1] dangereux que ne le sont communément les suites de leur victoire.

Un sage prince, qui a bien pénétré cette vérité, ne se laisse point emporter à l’ardeur de se signaler par des exploits, ni même tenter par l’espérance d’une victoire presque certaine. Il pèse attentivement les maux de la guerre, et ne s’y résout qu’à l’extrémité. Met-on en campagne cent mille hommes ? Tout est en mouvement pour cela. Chaque jour on dépense une

  1. Dans la suite cette pensée se développe.