Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/755

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Ven ti fondateur de la dynastie Souy, ne se fut pas plus tôt rendu maître de ce qui est au midi du Kiang[1], qu’il entreprit diverses expéditions contre les barbares. Yang ti son fils et son successeur, les poursuivit avec vigueur. Ils se réduisirent des royaumes qui étaient puissants, et se rendirent au dehors très redoutables ; mais au dedans les peuples surchargés les avaient en exécration. Il s’éleva de tous côtés des révoltes ; et ces troubles firent finir en peu de temps cette dynastie.

Tai tsong[2], après avoir soumis avec une rapidité surprenante Tou kiué, Kao tchang, Tou yu et d’autres pays, voulut encore se signaler davantage par quelque exploit plus considérable. Il entreprit sans aucune nécessité la guerre du Leao tong ; il marcha en personne contre la Corée. Il échoua, et s’en revint assez honteux. Ces guerres qu’il avait commencées, furent continuées encore plus mal à propos sous l’impératrice Ou, dont la mauvaise conduite pensa perdre la dynastie Tang. Tai tsong était un prince, qui de l’aveu de tout le monde, avait d’éminentes qualités ; sévère à lui-même, doux aux autres, bon, libéral, indulgent. Peu s’en fallut cependant qu’il ne tombât entre les mains des ennemis. Immédiatement après lui, sa postérité fut en grand danger de périr. On ne dira pas que ce fut en récompense de ses vertus. Il faut donc dire que ce fut en punition des guerres qu’il avait entrepris sans nécessité. Reprenons.

Vou ti et Tai tsong aimèrent la guerre. Comme c’étaient des princes d’ailleurs aimables et bons, leurs expéditions militaires ne les perdirent pas tout à fait. Chi hoang et Ven ti entreprirent aussi de grandes guerres ; comme ils étaient d’ailleurs cruels et haïs, la prompte extinction de leur race, fut le fruit de leurs victoires et de leurs conquêtes. Toutes les fois que je tombe sur ces endroits de notre histoire, je ferme le livre, et je fond en larmes : tant je suis touché de voir que des princes qui avaient de si grandes qualités, se soient si grossièrement trompés. Oh ! qu’il eût été à souhaiter pour ces quatre princes, qu’ils eussent eu d’abord quelque grand échec. Dégoûtés par là de la guerre, ils auraient craint de s’y engager ; et cette perte par cet endroit leur eût été très utile. Par malheur pour eux ils réussirent dans leurs entreprises. Ce succès échauffant en eux l’ardeur de se signaler et de conquérir, ne leur permit pas de prévoir ce qui devait suivre : et c’est ce qui m’a fait dire, que si nos princes sont vainqueurs, les fâcheuses suites de la guerre tardent un peu plus à venir, mais n’en sont que plus funestes ; au lieu que s’ils sont vaincus, les tristes effets de leur défaite sont communément moins dangereux. Pesez bien cela, je vous en prie.

Sin tsong, prince débonnaire et pacifique, qui aimait beaucoup ses peuples, régna très longtemps, sans jamais penser à la guerre. Les armes sous son règne étaient toutes couvertes de rouille. Cette longue paix rendit paresseux et négligents les généraux et les autres officiers de guerre. Yuen

  1. Nom du plus beau fleuve de la Chine.
  2. Second empereur de la dynastie Tang.