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TOMBOUCTOU LA MYSTÉRIEUSE

étaient debout depuis trois et quatre cents ans. Elles justifiaient cette prétention par le sol de leur rez-de-chaussée en contre-bas d’un mètre avec le niveau de la rue. Devant la maison, les siècles ont fait monter la chaussée : ainsi la Jérusalem d’aujourd’hui est bâtie à 4 ou 5 mètres de son niveau primitif. Les générations successives eurent donc toujours sous les yeux quelques modèles des temps anciens et, de cette façon, les types divers des maisons sont parvenus jusqu’à nous. De grands auvents, dont certaines sont pourvues, constituent la principale différence entre elles. Cette disposition de la porte fut provoquée par les pluies torrentielles qui menaçaient d’envahir le rez-de-chaussée. Elle est conçue dans le style massif et ne jure point avec la façade : ces auvents imitent à s’y méprendre les vastes manteaux de nos anciennes cheminées.

Une ou deux cours sont ménagées à l’intérieur des habilitations. Les rares ouvertures de ventilation ou de lumière sont garnies de dalles rouges en terre cuite, ajourées de dessins ornementaux et encastrées dans la muraille. Les Marocains, qui s’installèrent après la conquête à Dienné, inaugurèrent l’usage des fenêtres en bois, à volets et de style arabe. C’est la seule greffe d’art mauresque qu’ils réussirent à introduire. Encore ces fenêtres ne se fabriquèrent-elles jamais à Dienné ; elles arrivaient tout ouvragées de Tombouctou.

Il est certain, néanmoins, qu’à l’arrivée des Marocains l’originalité égyptienne de la ville courut un danger sérieux. Les nouveaux venus, imprégnés d’art arabe, tentèrent assurément d’autres innovations. Grâce toujours à sa précieuse glaise, Dienné en fut préservée. La matière ne convenait pas aux colonnettes, aux colonnades ou aux arceaux mauresques, ni aux arabesques, à toutes ces gracilités dont sont parées Fez et Marrakech, comme le Caire et Alger. Quelques tentatives d’adaptation durent être faites. Mais les premières pluies de l’hivernage les émiettèrent, les firent fondre, s’écrou-