Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/105

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sourcilleux. Il regarde donc avec dedain, et en fronçant le sourcil, une préference qu’on devine bien qu’il trouve injuste. Les hommes de ce temperament croïent volontiers ne pas valoir moins que les autres. Près de lui est placé un autre apôtre embarassé de sa contenance : on le discerne pour être d’un temperament mélancolique à la maigreur de son visage livide, à sa barbe noire et plate, à l’habitude de son corps, enfin à tous les traits que les naturalistes ont assignez à ce temperament. Il se courbe, et les yeux fixement attachez sur Jesus-Christ, il est devoré d’une jalousie morne pour un choix dont il ne se plaindra point, mais dont il conservera long-tems un vif ressentiment : enfin on reconnoît là Judas aussi distinctement, qu’à le voir pendu au figuier une bourse renversée au col. Je n’ai point prêté d’esprit à Raphaël, et je doute même qu’il soit possible de pousser l’invention poëtique plus loin que ce grand peintre l’a fait dans les tableaux de son bon tems. Une autre piece de la même tenture répresente saint Paul annonçant aux atheniens ce dieu auquel ils avoient dressé un autel sans le connoître, et Raphaël a fait de