Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/242

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nature plaît toujours. C’est donc parce que les faiseurs de comedie n’ont pas les yeux assez bons pour bien lire dans la nature, pour y demêler distinctement les differens principes des mêmes actions, et pour y voir comment les mêmes principes font agir differemment chaque individu, qu’ils ne sçauroient plus mettre au théatre de nouveaux caracteres. Il s’en faut bien que tous les ridicules du genre humain ne soient encore réduits en comedie. Mais quels sont, me dira-t-on, les caracteres neufs qui n’ont point encore été traitez. Je répons que j’entreprendrois d’en indiquer quelques uns, si j’avois un genie approchant de celui de Terence ou de Moliere, mais je suis de ceux dont Despreaux a parlé dans ces vers. La nature féconde en bizarres portraits dans chaque ame est marquée à de differens traits, un geste la découvre, un rien la fait paroître, mais tout mortel n’a pas des yeux pour la connoître. Pour demêler ce qui peut former un caractere, il faut être capable de discerner entre vingt ou trente choses que

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